L'adoption dans le cadre du projet de loi de finances 2025 (PLF 2025) d'une réduction drastique des droits d'importation sur le miel, passant de 40 % à 2,5 %, a provoqué une levée de boucliers dans le secteur apicole marocain. Au centre de cette polémique, Abdelkrim Zemzami, député du Rassemblement national des indépendants (RNI, majorité), membre de la commission de l'intérieur, des collectivités territoriales et des affaires administratives, principal importateur de miel au Maroc, soupçonné selon ses détracteurs «de manœuvres incompatibles avec l'intérêt national.» Selon des sources proches du dossier, «cette baisse significative des droits d'importation pourrait entraîner une distorsion du marché marocain où les produits étrangers domineraient au détriment des producteurs locaux.» Cela pourrait aussi, a-t-on indiqué, «réduire la rentabilité des apiculteurs nationaux qui peinent déjà face aux défis environnementaux.» À long terme, la compétitivité de l'industrie locale «serait mise en péril, ce qui menacera la durabilité du secteur apicole et la sécurité alimentaire marquées par l'érosion des capacités de production nationales, une situation qui risque de compromettre la souveraineté économique du pays», a-t-on ajouté après de Barlamane.com. L'abolition des droits d'importation sur le miel présente des implications économiques considérables pour les producteurs locaux. En abaissant les droits de 40 % à 2,5 %, la compétitivité des produits nationaux est directement menacée par l'afflux de miel bon marché provenant de l'étranger. Pour les apiculteurs locaux, cette mesure «réduit leurs marges bénéficiaires car ils ne peuvent pas rivaliser avec des produits étrangers souvent subventionnés.» En conséquence, la rentabilité du secteur apicole national est fragilisée, risquant des pertes d'emplois et une réduction de l'autosuffisance du pays. À moyen et long terme, «cela pourrait compromettre la viabilité de l'industrie apicole locale dont la pérennité dépend de la protection de la production nationale et de la durabilité des exploitations agricoles», a-t-on noté. Une mesure décriée Le Syndicat des apiculteurs professionnels du Maroc a décrit récemment cette mesure comme un "coup fatal" porté à la production nationale déjà affectée par des années de crise. Selon le syndicat, cette baisse des droits d'importation «menace directement des milliers d'emplois et compromet la souveraineté alimentaire du pays en contradiction avec les directives royales prônant le développement des filières agricoles nationales» rappelant que «70 % des ruches avaient été détruites lors des crises de 2021 et 2022, plongeant le secteur dans un état critique.» Conflit d'intérêts pointé du doigt Abdelkrim Zemzami, en tant que principal acteur du marché de l'importation de miel et parlementaire influent, est au centre des accusations. Pour plusieurs observateurs, cette mesure représente un exemple frappant de conflit d'intérêts. «Comment peut-on défendre une telle disposition alors que l'on est directement bénéficiaire de ses retombées ?», s'interroge un analyste économique qui a requis l'anonymat. Les critiques soulignent que la réduction des droits d'importation risque d'inonder le marché marocain de miel importé, souvent de qualité inférieure, entraînant une chute des prix qui serait dévastatrice pour les apiculteurs locaux. Des antécédents lourds de conséquences Cette mesure s'inscrit dans une série de décisions jugées préjudiciables au secteur apicole. En 2017, l'article 10 du décret n° 2.17.463 avait déjà permis le mélange du miel local avec du miel importé, affectant gravement la réputation et la qualité perçue du produit marocain. «Les intérêts des grands importateurs ont systématiquement primé sur ceux des producteurs locaux», déplore le syndicat, qui appelle à des mesures urgentes pour protéger la production nationale. Les apiculteurs réclament l'annulation immédiate de la réduction des droits d'importation, estimant qu'elle constitue une «attaque» contre la profession. Ils réclament également des éclaircissements sur les conditions d'adoption de cette disposition et sur le poids exercé par Abdelkrim Zemzami dans le processus législatif. En parallèle, le syndicat exhorte les autorités à renforcer les contrôles sur la qualité du miel vendu sur le marché marocain et à sanctionner sévèrement les pratiques de fraude et de falsification. Disparition massive des abeilles au Maroc Au Maroc, les plus grands ruchers collectifs traditionnels sont confrontés à une crise écologique majeure. En 2024, l'effondrement des colonies s'est accéléré, un phénomène observé à l'échelle nationale, attribué à une sécheresse exceptionnelle et à certaines pratiques agricoles intensives. Cette situation, déjà évoquée par l'Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA), a conduit les autorités marocaines à annoncer un plan d'aide de 130 millions de dirhams en 2022, qui n'a pas été renouvelé malgré les nombreux facteurs aggravants identifiés depuis : la vulnérabilité accrue des abeilles aux maladies, le climat sec et la transhumance apicole.