Le journaliste et opposant algérien Hichem Aboud, 69 ans, en exil en France, a révélé les conditions de son enlèvement à Barcelone le 17 octobre et sa libération, une semaine plus tard, par la Guardia Civil près de Lebrija, en Andalousie. M. Aboud, connu pour ses critiques à l'encontre du régime militaire algérien, affirme que cet acte vise à le ramener de force en Algérie. «Je savais qu'ils me voulaient vivant», a-t-il déclaré depuis la France à des médias espagnols. Selon son témoignage, M. Aboud s'était rendu à Barcelone depuis la Belgique pour y rencontrer des connaissances. Alors qu'il cherchait un taxi pour se rendre chez lui, quatre hommes encapuchonnés l'auraient forcé à monter dans un véhicule. À l'intérieur, le chef du groupe aurait donné la destination : «Málaga». Conduit vers le sud, M. Aboud explique avoir compris l'objectif de ses ravisseurs lorsqu'ils lui ont dit qu'ils allaient l'interroger brièvement avant de le libérer, lui demandant de se faire passer pour un ami s'ils étaient interceptés par la police et de ne pas mentionner l'Algérie. Malgré leurs précautions, le groupe aurait tenté d'échapper à un contrôle de la police en changeant de véhicule. Au terme d'un long trajet, ils l'auraient conduit en pleine campagne, où M. Aboud décrit avoir ressenti «l'odeur de l'herbe sèche». Là, un homme lui aurait murmuré qu'il serait transporté à Alger par bateau, mais en raison de la mer agitée, ils auraient opté pour une traversée en lancha. Selon M. Aboud, il a rapidement compris qu'il se trouvait près du Guadalquivir, loin de la mer. Au moment de l'embarquement, M. Aboud aurait entendu des bruits, déclenchant la fuite de ses ravisseurs. Deux membres du groupe – l'un sénégalais portant son passeport et l'autre marocain – tentaient alors de le conduire à l'embarcation. La Guardia Civil, menant un contrôle de routine dans une zone fréquentée par des narcotrafiquants, aurait repéré l'étrange scène. Ligoté, torse nu et couvert de boue, M. Aboud s'est présenté comme un «journaliste algérien et otage», demandant aux agents de vérifier son identité en ligne. Le nom de son ouvrage, La Mafia des généraux, aurait alors confirmé ses déclarations. Transféré au poste de la Guardia Civil à Lebrija, l'opposant algérien a reçu des soins médicaux pour plusieurs blessures, avant d'être entendu par les agents et présenté au juge de la localité andalouse. Le lundi suivant, il a été escorté à l'aéroport de Séville, d'où il a regagné Paris. Interrogé sur ses craintes pour sa vie, Aboud n'a montré aucun doute : «Ils me voulaient vivant en Algérie.» Dans un contexte diplomatique déjà tendu entre l'Espagne et l'Algérie, M. Aboud ne pense pas que cet incident provoquera de réaction officielle de la part d'Alger, estimant que les autorités algériennes «feront comme si de rien n'était». Il a toutefois annoncé l'envoi d'une lettre au président du gouvernement espagnol, Pedro Sánchez, pour lui demander de dénoncer cet acte aux autorités algériennes. Depuis la France, où il réside, Hichem Aboud continue de dénoncer, à travers les médias et sa chaîne YouTube, les abus du régime algérien. «Je n'ai pas peur», déclare-t-il, en précisant que la justice française enquête déjà sur une précédente tentative d'enlèvement en 2021. «Dieu m'a sauvé en Espagne et particulièrement en Andalousie, où j'ai de nombreux amis», conclut-il, exprimant une profonde gratitude envers la Guardia Civil, qui, selon lui, «lui a sauvé la vie.»