L'essai cosigné par deux spécialistes de la question mémorielle, Sébastien Ledoux et Paul Max Morin, remet en cause la politique algérienne du président français Emmanuel Macron, devenue un bourbier pour lui. Un «insuccès». Dans un livre remarqué par la critique, intitulé L'Algérie de Macron. Les impasses d'une politique mémorielle (Presses universitaires de France, 296 pages, 260 dirhams, 29 mai 2024), MM. Ledoux et Morin inventorient les maigres résultats de l'«investissement considérable» d'Emmanuel Macron en faveur de la politique algérienne, censé «clôturer le deuil» du passé. Le président français, qui a lancé en 2020 une mission sur «la mémoire de la colonisation et de la guerre d'Algérie», en vue de déclencher «la réconciliation entre le peuple français et le peuple algérien», ne parvient plus à gérer ce dossier. Les deux auteurs évoquent des mesures françaises «catégorielles» et des gestes de «mémorialisation», qui ne comblent en aucun cas le fossé entre les deux pays. Le livre mentionne un président qui tempère, qui utilise la question mémorielle à des fins électoralistes et qui agit sans concertation avec toutes les parties concernées par le sujet. Par ailleurs, la commission d'historiens français et algériens, créée en 2022 pour aborder le passé commun de la France et de l'Algérie (cinq réunions jusqu'à présent) n'aborde que des points souvent cosmétiques : «identifier et recenser des cimetières, des tombes et des noms de résistants enterrés en France», «apposer des plaques commémoratives» dans des «lieux mémoriels», restitution d'archives et de «biens symboliques» ayant appartenu à l'émir Abd el-Kader : des opérations complexes et qui doivent être validées par la France et par un ensemble d'acteurs privés. Pour les deux auteurs, Emmanuel Macron a mené entre 2017 et 2022 «une politique particulièrement active sur la guerre d'Algérie», sauf que derrière «le symbolique convoqué», force est de reconnaître que «l'inaction publique» a pris le dessus au point que «les impasses de cette politique mémorielle présidentielle malgré – et peut-être en raison – de l'investissement personnel du président», sont devenues entravantes, voire prégnantes. Emmanuel Macron «a finalement réduit son action à une politique catégorielle très traditionnelle envers les groupes mémoriels concernés, tandis que sa droitisation l'a amené à d'importants renoncements dans le traitement de cet héritage colonial de la société française dont le racisme demeure l'un des aspects les plus structurants», commentent les auteurs du livre. Pour rappel, le rapport sur lequel Emmanuel Macron a fondé sa politique mémorielle ne recommande ni excuses ni repentance, ce qui a été très mal vu en Algérie, notamment par les associations d'anciens combattants.