Le cash en circulation poursuit toujours son trend haussier. Après une croissance annuelle de 10,8% en 2022, les dernières statistiques monétaires de Bank Al-Maghrib (BAM), arrêtées à fin février dernier, font état d'un encours de la circulation fiduciaire de 358,3 milliards de dirhams (MMDH), en progression de 0,4% par rapport à un mois auparavant et de 11,4% par rapport à février 2022 (+36,8 MMDH en valeur). Comment s'explique alors cette hausse de la préférence pour le cash ? Quelles sont ses conséquences et sont-elles toujours négatives? BAM répond: 1. Quelles sont les conséquences d'une hausse de la circulation fiduciaire dans l'économie ? sont-elles toujours négatives ? La monnaie fiduciaire est l'un des moyens de paiement mis à la disposition des acteurs économiques pour réaliser des transactions. L'ampleur de son utilisation, mesurée par le ratio de la valeur des billets et pièces de monnaie en circulation par rapport au PIB, dépend donc, dans tous les pays du niveau de l'activité économique, mais varie d'une économie à l'autre, en fonction de la disponibilité des autres moyens de paiement, du coût de leur utilisation, mais aussi de la préférence des agents économiques. La hausse de la monnaie fiduciaire en circulation pourrait ainsi révéler une augmentation des transactions économiques et, par ricochet, de l'activité économique et ne peut être donc qualifiée systématiquement de négative. D'ailleurs, dans la plupart des travaux de modélisation de la circulation fiduciaire, la croissance économique figure comme le principal déterminant de la demande du cash. Cela étant, d'autres facteurs peuvent expliquer l'accélération de la circulation fiduciaire. En premier lieu, on peut citer la remontée des incertitudes incitant les déposants à réaliser des retraits massifs de billets de banque pour des besoins de précaution, situation qui a été observée dans notre pays lors de la crise sanitaire en 2020 quand la demande des billets de banque avait marqué, en une année, une expansion de 20%. Egalement, l'économie informelle, une composante essentielle de l'économie dans les pays à faible revenu ou émergents, peut aussi être à l'origine d'une demande soutenue du cash. Celle-ci est même considérée dans la littérature économique comme une des principales mesures indirectes des activités souterraines. 2. Quelles sont les causes de cette hausse de la préférence pour le cash ? Ce n'est pas facile de se prononcer sur les origines et les motivations derrière la hausse de la demande de cash. Certes, et comme nous l'avons indiqué, le facteur d'incertitude aurait pesé en 2020 avec l'avènement de la crise sanitaire et les décisions qui ont suivi, notamment en matière de limitation des mouvements des populations. Par contre, l'accélération de la circulation fiduciaire en 2022 a été enregistrée dans un contexte différent. Tout d'abord, la reprise des activités touristiques après deux années difficiles a induit des entrées exceptionnelles des billets de banque étrangers, génératrices du cash, qui ont atteint 86 MMDH, soit presque le double des niveaux observés en 2021 ou juste avant la crise sanitaire. Ensuite, la dynamique des transferts des Marocains Résidant à l'Etranger (MRE) qui s'est poursuivie en 2022, avec un flux d'un peu plus de 109 MMDH, aurait aussi contribué et de manière significative à l'accélération de la demande du cash observée l'année dernière. Dans tous les cas de figure, et en dépit des coûts engendrés par la hausse de la circulation fiduciaire pour tous les acteurs du cash-cycle, BAM a toujours œuvré et continue de veiller à mobiliser l'ensemble des intervenants, notamment les banques, pour mettre à la disposition des agents économiques les quantités désirées en cash. En effet, même dans des conditions particulières et difficiles lors de la période de confinement mise en place pour lutter contre la propagation de la Covid-19, la Banque, en coopération avec l'ensemble des intervenants, avait répondu à la totalité de la demande du cash, dans les délais et les meilleures conditions. 3. Quelle est votre analyse de la hausse du cash durant le mois de Ramadan et les fêtes religieuses ? La circulation fiduciaire dans notre pays, comme c'est le cas aussi à travers le monde, reste fortement rythmée par des mouvements saisonniers. Les occasions religieuses, à l'instar notamment du mois de Ramadan, Aid Al Adha et des périodes coïncidant avec les préparatifs de ces évènements, connaissent en général une hausse notable de la demande du cash. Pour le cas de l'année en cours, les flux nets, mesurés par les retraits diminués des versements des banques auprès des guichets de BAM, se sont établis entre les 1er et 22 mars 2023 à 2,9 MMDH. Ce niveau est largement supérieur aux flux enregistrés durant la même période en 2019 ou en 2018 quand le mois sacré avait commencé en mai. Toutefois, il y a lieu de préciser que cette hausse ne s'explique pas exclusivement par les effets du mois sacré, mais serait induite aussi par les entrées de billets de banque étrangers, largement supérieures à celles observées auparavant.