La première ministre française Elisabeth Borne se rendra en Algérie les 9 et 10 octobre, où se tiendra un comité intergouvernemental de haut niveau plusieurs fois reporté. Dans les faits, Paris, hanté par «l'hypothèse d'un arrêt complet de l'approvisionnement énergétique russe», veut s'approvisionner auprès des Algériens, en important massivement du gaz naturel liquéfié (GNL) à prix réduit. Mission difficile. La visite de la première ministre française Elisabeth Borne à Alger, perçue comme un signe de réchauffement entre les deux pays aux relations complexes, sera une mission ardue, empoisonnée par la censure dirigée contre le président Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK, indépendantiste), Ferhat Mehenni, et téléguidée par l'Elysée. M. Mehenni allait intervenir sur une chaîne française afin d'aborder la violente réplique du pouvoir de Tebboune contre la contestation populaire et la répression massive menée par le pouvoir algérien à l'encontre des oppositions au sein du pays. Si Paris veut surtout s'entretenir avec Alger d'une augmentation des fournitures pour faire face au dur hiver qui se profile, en Algérie, le pouvoir est peu amené à répondre favorablement «aux besoins en matière de sécurité énergétique française», d'autant plus que les capacités d'interconnexion entre les deux pays «sont techniquement limités», font valoir nos sources. «Ceux qui pensent que le régime algérien a pardonné au président français ses propos sur le système politico-militaire algérien [accusé d'entretenir une rente mémorielle en servant une histoire officielle qui ne s'appuie pas sur des vérités] se trompent lourdement», a-t-on pointé. «Les sujets de friction sont beaucoup plus nombreux qu'on l'imagine», glissent nos sources. Selon Le Figaro, «pas moins de seize ministres l'accompagneront pour continuer de ressouder les liens entre Paris et Alger», il s'agit de «Bruno Le Maire (Economie), Gérald Darmanin (Intérieur), Catherine Colonna (Affaires étrangères), Olivier Dussopt (Travail), Agnès Pannier-Runacher (Transition énergétique), Pap Ndiaye (Education nationale) ou encore Rima Abdul Malak (Culture).» L'année dernière, un comité intergouvernemental franco-algérien a été annulé à la dernière minute, officiellement en raison de l'épidémie, mais selon des diplomates, «le format de la délégation n'était pas à la hauteur» a argué Alger. «La visite a été réduite à une seule journée et la délégation à quatre ministres. C'est un sous-format alors qu'il y avait beaucoup de dossiers bilatéraux à étudier», avait déploré une source algérienne. Selon nos sources, le gouvernement français a été vertement critiqué pour avoir cédé du terrain au voisin italien, lequel a signé en juillet avec le régime algérien quinze mémorandums d'entente et accords concernant la coopération industrielle et énergétique, entre autres domaines. L'accord pour un accroissement des volumes livrés à la France rencontre un autre obstacle majeur : en plus du fait qu'Alger ne dispose que d'une capacité très limitée pour augmenter ses exportations, l'entreprise étatique algérienne des hydrocarbures Sonatrach veut désormais fixer les niveaux des prix de vente de gaz naturel, selon les conditions du marché, pour l'exercice 2022-2023, ce qui a poussé le Conseil européen pour les relations internationales (ECFR) à affirmer que l'Algérie cherche à profiter du contexte actuel de la guerre en Ukraine pour augmenter ses revenus. Pour rappel, la la dette publique française a atteint 114,5 % du produit intérieur brut (PIB) à la fin du premier trimestre 2022, contre 112,9 % à la fin décembre 2021. L'endettement public de la France a explosé depuis le déclenchement de la crise sanitaire, et s'est encore aggravé de 88,8 milliards d'euros au premier trimestre, selon l'Institut national de la statistique et des études économiques, l'Insee.