Aziz Akhannouch est plus contesté que jamais en raison de sa double casquette de chef du gouvernement et d'actionnaire principal d'Afriquia, leader sur le marché local des hydrocarbures. Sur les réseaux sociaux, il est accusé d'engranger des marges «indécentes», sur fond de dénonciations de la vie chère et de la collusion entre le monde des affaires et certains responsables étatiques. Une nouvelle campagne de boycott, qui cible le carburant vendu par la marque de Aziz Akhannouch, a relancé le débat jamais inapaisé au Maroc sur la collusion entre les affaires et la politique. Se répandant comme une trainée de poudre sur les réseaux sociaux, depuis quelques jours, cette action a engendré des milliers de commentaires et d'interactions. Promue par certaines pages très suivies, elle vise les stations-service Afriquia, au moment où la hausse brutale des prix des denrées alimentaires et des carburants mécontente de larges franges de la société marocaine, lesquelles réclament un plafonnement urgent des marges «exorbitantes» des distributeurs de carburants. Depuis la libéralisation, les profits des distributeurs ont atteint «plus de 45 milliards de dirhams jusqu'en 2021», selon des sources syndicalistes, qui dénoncent également les profits colossaux de certains distributeurs de carburants, au premier rang desquels le groupe Afriquia, visé par le nouveau boycott. D'autres sources évoquent le rapport parlementaire explosif sur l'évolution des prix des carburants produit en 2018. La version finale de ce rapport, expurgée de ses chiffres les plus crus, a démontré que les importateurs de carburants ont augmenté considérablement leurs marges, à commencer par Afriquia. L'exécutif est également accusé d'incurie pour sa prétendue «incapacité» à redémarrer la seule raffinerie du royaume, implantée à Mohammedia, en liquidation depuis 2018. Si elle était en activité, la Samir aurait aidé à éponger l'augmentation du prix de l'énergie. L'essence sans plomb frôle, selon nos dernières estimations, les 18 dirhams le litre et le gazole près de 16 dirhams, des niveaux jamais égalés auparavant. L'accord signé fin avril et qui prévoit une revalorisation du salaire minimum de 10 % sur deux ans dans les secteurs de l'industrie, du commerce et des services, n'a pas arrangé les choses. Dans le public, le salaire minimum est passé à 3 500 dirhams net contre 3 362 dirhams auparavant, un geste considéré comme insuffisant et peu convaincant, alors que le royaume devrait connaître une inflation élevée (+4,7 %) et une croissance mitigée (+0,7 %) en 2022, selon les très récentes prévisions de la Banque centrale marocaine. Les prix à la consommation (+3,3 % pour janvier et février 2022 sur un an) grimperont encore à «des niveaux supérieurs à la moyenne de la dernière décennie», d'après le Haut-Commissariat au plan (HCP). Les quatre centrales syndicales les plus représentatives, à savoir l'Union marocaine du travail (UMT), la Confédération démocratique du travail (CDT) et l'Union générale des travailleurs du Maroc (UGTM) ainsi que l'Union nationale du travail au Maroc (UNTM) ont brisé leur silence alors que la tension monte. Dans une lettre diffusée cette semaine, la Confédération démocratique du travail (CDT), a appelé Aziz Akhannouch à «intervenir d'urgence pour protéger le pouvoir d'achat de la classe ouvrière et de la population en général, et se rendre compte de l'ampleur des souffrances qu'ils subissent». Trois autres syndicats ont annoncé une grève nationale dès le 20 juin dans la fonction publique, les collectivités locales et les transports pour protester contre la cherté de la vie. Pendant ce temps, le chef du gouvernement continue de nous casser les oreilles par des réalisations qu'il s'attribue alors qu'elles sont l'œuvre de ministres qui travaillent sans relâche dans l'ombre, à l'instar de celui de la santé et de la protection sociale et celui de l'éducation nationale qui a apporté une vraie dynamique, alors que sur le secteur qui préoccupe gravement les marocains et interpelle au premier chef Aziz Akhannouch, à savoir la hausse vertigineuse des prix des carburants qui entraîne dans son sillage l'augmentation des prix de la quasi-totalité des produits, c'est motus et bouche cousue! Jusqu'à quand ?