Majorité absolue ou simple ? De retour d'Ukraine, Emmanuel Macron a plaidé l'unité de la France vendredi pour la dernière journée de campagne avant le second tour des législatives, tandis que Jean-Luc Mélenchon a mis en garde contre une « pagaille » si les électeurs ne tranchaient pas nettement. A quelques heures de la fin, à minuit, d'une campagne envenimée entre macronistes et mélenchonistes, le chef de l'Etat a dit sur BFMTV revenir « marqué » par ce qu'il a vu en Ukraine. Les oppositions n'ont cessé depuis mardi de lui reprocher son absence du sol français juste avant le scrutin de dimanche. « Le moment était celui qu'il fallait parce que c'est celui où nous étions prêts pour agir en Européens », a-t-il ajouté. « J'ai la conviction que notre pays, s'il sait se réunir, se retrouver dans le respect des différences qu'il y a entre les uns et les autres, peut ressortir plus fort de cette crise », a-t-il ajouté, soulignant qu' »on a besoin d'une France vraiment européenne ». « C'est bien d'y aller, (mais) dommage que ce soit si tard », a estimé l'ex-candidat EELV à la présidentielle Yannick Jadot sur franceinfo. « Il a eu raison de le faire (…), mais ce qui interroge c'est le timing », a abondé sur Cnews le président par intérim du Rassemblement National Jordan Bardella, reprochant au chef de l'Etat d »'instrumentaliser la guerre ». – Canicule – Jean-Luc Mélenchon, chef de file de la gauche unie Nupes (LFI, PS, EELV, PCF), qui se voit Premier ministre, a lui insisté sur la nécessité face à M. Poutine de montrer « qu'il n'y a pas une fissure dans l'opposition, que nous faisons tous front face à l'invasion et au saccage de l'Ukraine ». Outre l'Ukraine, la canicule s'est aussi invitée dans la campagne. Le leader de LFI a attaqué en conférence de presse « l'inaction climatique » d'Emmanuel Macron qui croit, selon lui, « que le marché va tout régler ». Emmanuel Macron a lui rappelé, en marge d'une visite au salon Vivatech, qu'il prévoyait une « loi d'urgence écologique » pour cet été afin de « développer les énergies renouvelables » et « les grands projets ». « Ça va râler, mais il faut le faire », a-t-il insisté. La Première ministre Elisabeth Borne a précisé que le texte serait déposé en juillet. Depuis la circonscription qu'elle brigue dans le Calvados, la cheffe du gouvernement a de nouveau fustigé un projet de la Nupes aux « conséquences très négatives » sur l'économie, ainsi que les « mensonges » de Jean-Luc Mélenchon, alors qu' »on a besoin de stabilité » et d'une « nette majorité ». Car les sondages ne garantissent pas une majorité absolue (289 sièges) au camp présidentiel. Ensemble! obtiendrait entre 255 et 295 sièges, selon l'institut Elabe, 265 et 305 selon Ipsos et 270 à 300 selon l'Ifop-Fiducial. La Nupes est créditée elle de 150 à 200 députés selon Elabe, 140 à 180 selon Ipsos, et 160 à 190 selon l'Ifop-Fiducial. – Report de voix – « La situation n'est pas favorable » à Emmanuel Macron, dont la coalition Ensemble! a réuni 26% au premier tour des législatives, alors qu' »un tiers » de ses électeurs l'avaient soutenu aux législatives en 2017, rappelle Jean-Daniel Lévy, directeur général de l'institut de sondages Harris Interractive. Le résultat du scrutin dimanche « dépend de la dynamique de campagne, de l'abstention et du report de voix », explique Bernard Sananès, président d'Elabe. Moins d'un électeur sur deux s'était déplacé lors du premier tour et la tendance devrait se confirmer dimanche, d'après les enquêtes d'opinion. Les camps macroniste et mélenchoniste, qui constitueront les deux principaux blocs de la future Assemblée nationale, continuent chacun d'alerter sur le risque d'un hémicycle ingérable en cas de victoire de l'autre. Côté LFI, on répète que « le chaos, c'est eux ». Jean-Luc Mélenchon a exhorté vendredi à se rendre aux urnes pour « trancher » car « si vous ne tranchez pas net ce que vous voulez, ça sera la pagaille pendant des mois ». Quant aux Républicains, ils se voient en arbitres: « si Emmanuel Macron n'a pas la majorité absolue, alors la droite deviendra incontournable » et son « rôle sera d' »aiguillonner le gouvernement vers des réformes qui sont plutôt des marqueurs de droite », a affirmé sur RFI l'eurodéputée Agnès Evren. Marine Le Pen a souhaité depuis sa circonscription du Pas-de-Calais « faire d'Emmanuel Macron un président minoritaire » tout en fustigeant « une extrême gauche qui est la plus sectaire qui soit, la plus violente ». Elle a redit « craindre » l'abstention et a exhorté ses électeurs à aller voter et « qu'ils nous aident à les défendre ».