Pour être efficace, protéger les vies, réduire le risque d'émergence de variants et vaincre la pandémie, la vaccination devrait être complète, large et rapide, a affirmé le médecin-chercheur en politiques et systèmes de santé, Tayeb Hamdi. La situation vaccinale n'est pas complète actuellement, avec la succession des lettres de l'alphabet grec qui repousse les dates de fin de la pandémie et le retour à la vie d'avant Covid-19, a relevé le médecin dans une tribune intitulée "Covid 19 : Les quatre grands alliés des variants, brevets, inégalité, hésitation et relâchements". Néanmoins, les mesures barrières individuelles et collectives, adaptées selon les dernières découvertes scientifiques rapides et la vaccination développée en moins d'une année, ont pourtant pu sauver des vies, relancer l'économie et la vie sociale là où elles ont été appliquées. "Elles nous avaient ouvert la voie de la victoire", s'est-il réjoui. Pour M. Tayeb, la production des vaccins a été insuffisante à cause du refus des laboratoires et de certains pays, de la levée des brevets qui aurait accéléré la production et l'accessibilité à ces vaccins, et qui aurait aussi contribué à la préparation de la planète à faire face aux nouveaux variants et aux épidémies à venir. Avançant l'exemple de Pfizer, Bion Tech et Moderna qui ont bénéficié de huit milliards de dollars de l'argent public pour mettre au point leurs vaccins, le chercheur note que ces laboratoires ont pu réaliser un bénéfice avant impôt de plus d'un million de dollars par jour. Le transfert de technologie aurait permis de démarrer la production à grande échelle en huit à dix mois, et si couplée au transfert du savoir, cette durée aurait été écourtée de moitié, a-t-il souligné, ajoutant que ce transfert aurait permis d'accélérer la cadence, de prévoir une production rapide et massive de nouvelles versions de vaccins si nécessaire, et d'élargir l'industrie vaccinale pour préparer la planète aux futures épidémies. S'agissant des inégalités vaccinales qui ont empiré le paysage vaccinal, l'auteur dénote que les pays riches ont pu vacciner toute la population y compris les jeunes et les enfants à moindre risque, en laissant les populations très à risque dans d'autres pays, ce qui est "un échec plus que moral". Laisser le virus circuler librement dans plusieurs régions du monde, revient à créer les conditions idéales de l'émergence de nouveaux variants, une sorte de "mutagenèse organisée", a-t-il regretté. L'Afrique avec 17% de la population mondiale n'a administré à ce jour que 3,01% des doses déployées dans le monde, a-t-il dit, précisant que moins d'un africain sur 14 est complètement vacciné, alors que dans l'Union Européenne (UE) plus de deux sur trois le sont déjà. Evoquant sa tribune publiée début février sous le titre "Avec le nationalisme vaccinal, la fin de la pandémie n'est pas pour demain !" , M. Tayeb a rappelé avoir dénoncé cette injustice vaccinale et mis en garde contre ses conséquences. "Beaucoup d'autres l'ont également fait, mais des bras attendent toujours", a-t-il plaidé. Le virus profite également des inégalités d'accès aux tests et autres moyens de diagnostic, a noté le chercheur-médecin, précisant que l'initiative COVAX n'a pas pu atteindre ses objectifs par faute de moyens et d'engagement des pays riches. L'hésitation vaccinale s'est dramatiquement alliée au virus, laissant à risque une partie de la population dans des pays où les vaccins attendent des bras, a-t-il dit. S'agissant de l'infodémie, M. Tayeb a relevé qu'avec les réseaux sociaux, une fake news se propage six fois plus vite qu'une vraie, et touche un public plus large. Il a, à ce sujet, considéré que l'infodémie tue et éternise la pandémie, prenant les individus en otage. "Les fake news sur les vaccins entretiennent la peur et la méfiance, et orchestrent un effet Nocebo contre les vaccins", a-t-il dit. En ce qui concerne le relâchement précipité des populations et gouvernement, le chercheur l'a considéré en tant que quatrième grand allié de la covid-19. Après chaque pic épidémique, s'installe un faux sentiment de sécurité suivi d'un relâchement et une précipitation des gouvernements vers la levée prématurée des restrictions pour des raisons économiques, a-t-il déploré.