Alger a décidé de ne plus utiliser le pipeline qui transite chez le Maroc. Si les livraisons de gaz algérien à l'Espagne se feront désormais exclusivement via le gazoduc sous-marin Medgaz, après la décision d'Alger d'abandonner le pipeline utilisé actuellement et qui transite par le Maroc, à Madrid on craint les conséquences d'une telle décision. L'Algérie ferme le pipeline GME (Gaz Maghreb Europe), veut expédier plus de gaz naturel liquéfié par voie maritime (une mesure qui n'a pas de sens sur le plan économique) selon les observateurs, veut priver le Maroc d'une source d'approvisionnement en gaz, même au risque perdre une partie de ses recettes d'exportation de gaz. Enfin, malgré une possible perturbation des livraisons espagnoles et dans un contexte de forte hausse des prix dans toute l'Europe, l'Algérie persiste dans sa décision de tuer le GME. Une affreuse tragicomédie. Depuis 1996, l'Algérie expédie vers l'Espagne et le Portugal environ 10 milliards de mètres cubes de gaz naturel par an via le GME (Gaz Maghreb Europe), un gazoduc traversant le Maroc, mais Alger a décidé de ne pas reconduire ce contrat, sur fond de grave surenchère diplomatique algérienne. Un autre pipeline, le gazoduc sous-marin Medgaz, achemine aussi depuis 2011 du gaz algérien jusqu'à l'Espagne, mais il opère déjà au maximum de sa capacité de 8 milliards de mètres cubes par an, soit la moitié des exportations algériennes annuelles vers ce pays et le Portugal. La poursuite des livraisons à l'Espagne a été au centre de discussions, mercredi à Alger, entre la ministre espagnole de la transition écologique, Teresa Ribera, chargée de l'énergie, et le ministre algérien de l'énergie et des mines, Mohamed Arkab. L'Algérie est le premier fournisseur de gaz naturel de l'Espagne. Alors que les prix du gaz, du pétrole et du charbon ne cessent de grimper sur les marchés internationaux et que l'hiver approche à grands pas, les autorités espagnoles s'empressent de trouver une solution à la fermeture imminente du gazoduc Maghreb-Europe (MGE), une source majeure de gaz naturel pour la péninsule ibérique. Teresa Ribera, la ministre espagnole de la transition écologique, s'est rendue mercredi en Algérie pour évoquer les conséquences de la fermeture de ce gazoduc à un moment où trouver un approvisionnement alternatif est plus compliqué que jamais. L'accord d'exploitation de 25 ans de GME expire dimanche. Inauguré en 1996, ce gazoduc achemine le gaz naturel d'Algérie vers le sud de l'Espagne sur 1 400 kilomètres, traversant 540 kilomètres de territoire marocain. Mais la détérioration des relations entre l'Algérie et le Maroc a conduit Alger à annoncer que l'accord ne sera pas renouvelé. «L'Espagne reçoit également du gaz naturel d'un deuxième gazoduc algérien, Medgaz, mais elle craint que cette source ne puisse pas combler le déficit. Et une pénurie d'approvisionnement en gaz à ce moment particulier serait un coup dur, car les consommateurs espagnols sont déjà sous le choc de la flambée des prix de l'électricité, du carburant et du gaz naturel utilisés pour chauffer les maisons» selon El País «Alors que d'autres membres de l'UE comme l'Allemagne dépendent du gaz de la société russe Gazprom, qui fournit un tiers de tout le gaz en Europe, l'Espagne importe d'Algérie près de la moitié de tout le gaz naturel qu'elle consomme en un an» note la même source. «L'Espagne n'a pas besoin du gaz uniquement pour l'industrie et les systèmes de chauffage. En fait, près d'un tiers de toute l'électricité produite en Espagne est conçue par des centrales électriques à cycle combiné, qui utilisent du gaz naturel. Ces installations sont un appoint essentiel aux énergies renouvelables : en l'absence de soleil et de vent, l'approvisionnement en électricité repose en grande partie sur la combustion du gaz naturel et sur les centrales nucléaires, dont l'approvisionnement est toujours régulier» a-t-on noté. Selon le journal espagnol, «il faudrait une cinquantaine de ces navires pour acheminer les quatre milliards de mètres cubes nécessaires à l'Espagne pour combler le déficit de MGE qui ne peut être couvert par Medgaz. Il ne sera pas facile de trouver autant de transporteurs, et ils seront chers à une époque de forte demande. En outre, le processus de liquéfaction du gaz et de son retour ultérieur à l'état gazeux est beaucoup plus coûteux que de simplement le canaliser dans un pipeline» s'alarme-t-on.