Le Conseil supérieur de la communication audiovisuelle (CSCA) réaffirme, à l'issue de sa réunion du 27 avril, la centralité de la liberté de création à la suite de plusieurs plaintes concernant différentes œuvres de fiction télévisuelle. Le contrôle des contenus et sa légitimité demeurent posés, et la question de la subjectivité sous-jacente à toute appréciation de ce qui est diffusé hante les débats. Plusieurs séries télévisées n'en finissent plus de faire polémique. Leur vision satirique de la société marocaine et le choix résolu de tourner en dérision de très nombreuses communautés a indigné. Un communiqué de la Haute autorité de la communication audiovisuelle (HACA) indique que le CSCA a, après avoir étudié l'ensemble de ces plaintes, délibéré et statué à leur sujet, établit le fait que «la liberté de création artistique telle que garantie par la Constitution fait partie intégrante de la liberté de la communication audiovisuelle consacrée par la loi N°77.03 relative à la communication audiovisuelle et par la loi N°11.15 relative à la réorganisation de la Haute autorité», et précise que «ce droit à la liberté doit être garanti tout particulièrement quand il s'agit d'œuvres de fiction». Plusieurs voix ont dénoncé ces derniers jours une entorse au principe de «pluralisme de l'expression de courants de pensée et d'opinion» et que «l'éthique des programmes» ne signifie nullement l'usage de la censure. Pour l'autorité marocaine de régulation de l'audiovisuel, une «œuvre de fiction ne peut s'accomplir ni prétendre à une valeur artistique sans une liberté effective à tous les niveaux de la conception de l'œuvre à savoir le scénario, les situations, les scènes, les profils des personnages, les dialogues, etc., expliquant que cet impératif de liberté est encore plus patent lorsqu'il s'agit d'œuvres comiques ou parodiques» «La représentation critique d'une profession concernée dans une œuvre audiovisuelle de fiction ne constitue pas une diffamation telle qu'elle est légalement définie, ni ne comprend nécessairement une intention d'offenser ou de nuire, notant qu'elle renvoie, en revanche, au droit de l'auteur de l'œuvre de faire, en toute liberté, les choix artistiques qui lui conviennent» a-t-on indiqué. Le Conseil pointe qu'«exiger, dès lors qu'il est question de telle ou telle profession, que les fictions ne représentent que des personnages positifs, honnêtes et intègres reviendrait à porter atteinte à la liberté des auteurs et des opérateurs», mentionnant qu'«une telle exhortation tend à nier la responsabilité et le rôle salutaire des médias, notamment en termes d'exercice du jugement critique à l'égard de phénomènes sociaux ainsi qu'en matière de sensibilisation à l'égard de certains comportements et pratiques répréhensibles». Les plaintes formulées, affirment l'institution, «partent d'une représentation inexacte, à la fois, du concept de la régulation des contenus médiatiques et du mandat institutionnel de la Haca» Le CSCA rappelle à ce titre que «la loi garantit en effet aux radios et aux télévisions publiques et privées, la production et la diffusion de leurs programmes en toute liberté», et note qu'«au titre de son mandat constitutionnel, la Haca est chargée d'assurer le respect et la protection de cette liberté en tant que principe fondamental, tout en veillant à ce que tous les contenus diffusés, qu'ils soient de fiction, informationnels ou autres, respectent les principes des droits humains». C'est ainsi que l'instance de régulation «veille au respect dans les contenus médiatiques de principes aussi fondamentaux que le principe de la présomption d'innocence, le respect de la vie privée, le respect de la dignité humaine» et «les contenus médiatiques diffusés ne doivent pas non plus inciter au racisme, à la haine ou à la violence, ou encore discriminer ou stigmatiser les femmes ni exposer l'enfant et le jeune public à des risques physiques, psychologiques ou mentaux». Par ailleurs, la Haca reconnaît que «la question de la qualité» de l'offre télévisuelle publique et privée «reste posée» et «constitue un réel défi» qui ne peut être relevé «sans l'engagement de toutes les composantes du système médiatique», détaille le communiqué. Le CSCA rappelle que «l'une des finalités de la régulation est de promouvoir les valeurs de la liberté, de favoriser le renforcement du potentiel d'initiative et de créativité médiatiques» ainsi que «d'alerter sur tout ce qui peut contrecarrer la réalisation de ces objectifs» afin «contribuer significativement à la promotion d'une culture médiatique éclairée». La HACA, garant de la liberté de communication, reçoit souvent des plaintes au motif que certaines œuvres de fiction diffusées sur les chaînes de télévision nationales comporteraient «des scènes ou des dialogues qui seraient préjudiciables à l'image de certaines professions voire qui porteraient offense à leurs membres», indique le communiqué de l'instance, qui explique que pendant le mois de ramadan, une «augmentation notable du nombre de ces plaintes est remarquée».