La décision de l'Inde de ralentir les exportations de vaccins contre le coronavirus va compliquer l'objectif de vaccination prévu en Afrique, a déclaré jeudi le chef du Centre de contrôle et de prévention des maladies du continent (Africa CDC). Parfois surnommée la «pharmacie du monde», l'Inde a annoncé la semaine dernière qu'elle allait retarder ses exportations de vaccins, alors qu'elle fait face à une nouvelle vague d'infections et une campagne de vaccination défaillante dans le pays. Or, les vaccins Oxford-AstraZeneca produits par le Serum Institute of India représentent «l'épine dorsale» de la campagne de vaccination menée en Afrique, a déclaré en conférence de presse John Nkengasong, le directeur de l'Africa CDC, qui dépend de l'Union africaine (UA). La majorité des livraisons de doses sur le continent proviennent du programme Covax, destiné notamment à approvisionner les pays les plus pauvres. «Si celles-ci sont retardées, il est peu probable que nous atteignions nos objectifs», a déclaré John Nkengasong, en référence à l'objectif fixé de vacciner environ 30% de la population dans les 55 Etats-membres de l'UA d'ici la fin 2021. «Si le retard continue -et je veux vraiment espérer qu'il s'agit d'un retard et non d'un moratoire, car ce serait catastrophique si tel était le cas- alors le respect de notre calendrier de vaccination deviendra problématique, très, très problématique», a-t-il ajouté. Plus tôt cette semaine, Johnson & Johnson a annoncé qu'il fournirait jusqu'à 400 millions de doses de son vaccin aux pays africains, mais les premières livraisons ne devraient pas intervenir avant le troisième trimestre 2021. Les pays africains ont jusqu'à présent reçu plus de 29,1 millions de doses de vaccin et en ont administré 10,3 millions en se concentrant sur les employés de santé, les personnes âgées et les personnes souffrant de comorbidités, a indiqué M. Nkengasong. Certains pays africains sont actuellement confrontés à de forts rebonds de la pandémie, comme le Kenya qui a connu une augmentation hebdomadaire moyenne de 53% des cas au cours du dernier mois. Dans ce pays, la campagne de vaccination a été chaotique, alimentée notamment par une forte méfiance des agents de santé. Certains centres de vaccination sont à court de doses, notamment car de nombreuses personnes n'appartenant pas aux catégroies prioritaires se présentent dans ces centres et reçoivent le vaccin. Le vaccin russe Spoutnik V est également vendu dans des cliniques privées pour environ 70 dollars (59 euros) pour deux doses. M. Nkengasong a également exprimé son inquiétude à propos d'un nouveau variant, hautement muté, détecté récemment en Angola chez des personnes ayant voyagé depuis la Tanzanie. Après la mort du président covido-sceptique tanzanien, John Magufuli, les responsables du CDC africain «utilisent différents canaux» pour travailler avec l'administration de sa successeure Samia Suluhu Hassan, a indiqué M. Nkengasong.