Le multilatéralisme est le seul processus capable de tempérer les relations internationales et d'encadrer la gestion des défis communs, car il rompt avec le caractère économique et commercial proéminent de la mondialisation et "bride l'influence des puissance en protégeant les faibles et en donnant la voix aux sans voix", a indiqué l'ancien ambassadeur du Royaume auprès des Nations Unies, Mohammed Loulichki. Intervenant lors d'une visioconférence tenue à Rabat dans le cadre de la 9ème édition des Dialogues Stratégiques du Policy Center for the New South (PCNS), placée sous le thème de "la démondialisation", M. Loulichki a souligné que la mondialisation, qui a transformé le monde en un village global, a créé une interdépendance et une interconnexion entre les États en offrant des opportunités économiques et en posant des défis communs car, en tant que processus à la fois incontournable et irréversible, elle permet une ouverture économique sur le monde et se présente comme une promesse de développement multilatéral à même de réduire les disparités entre les pays du monde. Néanmoins, malgré la promesse de prospérité partagée entre les pays développés et ceux en développement, l'ancien diplomate estime que la mondialisation interpelle du fait que, selon lui, depuis que les Organisations internationales ont commencé à coordonner la coopération et à construire les interdépendances entre les États, elle a créé des marginaux et des laissés pour compte, notamment en Afrique où plus de 400 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté. En somme, servant les intérêts des pays développés, la mondialisation a enrichi les plus riches sans pour autant offrir une vie décente aux plus défavorisés, a-t-il dit. Cet état des lieux perfectible de la mondialisation, a poursuivi M. Loulichki, a laissé place à des mouvements de contestation de part le monde qui sont empreints d'une remise en cause de la démocratie représentative, d'une désaffection vis à vis des élites gouvernantes et d'un recul manifeste des valeurs humaines qui ont présidé à la création des institutions multilatérales telles que la solidarité et la coopération pour le développement. Cette situation a également provoqué la réflexion à des alternatives à la mondialisation, à l'instar d'un "retour en autarcie", des appels à la démondialisation, de la relocalisation, du repli national, du renforcement de la souveraineté économique ou encore de l'autonomie industrielle, a-t-il relevé. Pourtant, l'ancien diplomate a estimé que le multilatéralisme universel est en perte de vitesse et que ses chances de reprendre le dessus sont très minces compte tenu des circonstances actuelles, ajoutant qu'aujourd'hui l'on assiste à la prévalence du multilatéralisme régional à travers les exemples de l'Union européenne, du Japon, de la Chine et de la Russie qui s'organisent dans une logique de proximité. A ce titre, M. Loulichki a préconisé que l'action des pays devrait désormais se situer dans la dimension régionale dans l'attente de la réhabilitation d'un multilatéralisme universel capable de gérer les défis du 21ème siècle, lequel ne "pourrait reprendre tout ses droits sans un véritable leadership et des réformes des institutions chargées de la gouvernance mondiale". Lors de cette rencontre, animée par l'ancienne ministre de la femme et la famille et ancienne ambassadrice, Nouzha Chekrouni, l'ancien ministre de l'économie et des finances, Fathallah Oualalou, l'ancien ambassadeur du Royaume auprès des Nations Unies, Mohammed Loulichki et l'économiste et membre de la Commission spéciale sur le modèle de développement, Larabi Jaidi, ont débattu des nouveaux paradigmes de l'ordre mondial, entre mondialisation et protectionnisme, dans un contexte marqué par la crise sanitaire liée à la pandémie du Covid-19.