Face aux protestations, qui ont duré de novembre 2017 à avril 2018, les autorités avaient annoncé une batterie de mesures pour relancer l'économie locale, promis de fermer les puits abandonnés, avec un plan de reconversion pour les mineurs clandestins, et interdit toute manifestation illégale. Le Conseil national des droits de l'Homme (CNDH) a publié son rapport thématique sur les protestations de Jerada, en vertu des articles 4 et 5 de la loi 76-15 relative à la réorganisation du Conseil dans les domaines de monitoring, de surveillance et de suivi de la situation des droits de l'Homme aux niveaux national et régional. La publication de ce rapport s'inscrit dans le cadre des prérogatives du Conseil en tant qu'institution nationale pluraliste et indépendante, chargée de connaître de toutes les questions relatives à la défense et à la protection des droits de l'Homme et des libertés, à la garantie de leur plein exercice et à leur promotion, ainsi qu'à la préservation de la dignité, des droits et des libertés individuelles et collectives des citoyennes et citoyens, indique le CNDH dans un communiqué. Adopté à l'unanimité par l'assemblée générale du Conseil, tenue du 6 au 8 mars denier, ce rapport vise à observer, suivre et documenter ces événements et évaluer leurs impacts sur les droits et libertés, conformément aux conventions internationales ratifiées par le Maroc et aux garanties prévues par la Constitution et la législation national. Il a pour objectifs de soumettre des propositions basées sur l'approche droits de l'Homme qui serait de nature à contribuer à résoudre les questions liées aux revendications exprimées durant les protestations de Jerada et de tirer les enseignements à même d'éviter qu'elles ne se reproduisent dans des contextes similaires. Ainsi, dans l'introduction dudit rapport, la présidente du CNDH, Amina Bouayach a souligné que « les protestations qui ont eu lieu dans la ville de Jerada, une des villes dépendant de l'activité minière, constituent l'une des manifestations de la problématique liée à la transition de la phase de l'exploitation des mines à la phase post-épuisement des ressources », ajoutant que cela aurait dû constituer une occasion pour mener une réflexion sur le développement d'une stratégie anticipative nationale qui vise à traiter les transformations d'ordre économique, social et environnemental dans la ville de Jerada et les régions enregistrant une situation similaire. Elle poursuit que « ces transformations rendent inévitable une transition post-exploitation des mines, étant donné que ces dernières ont une durée de vie hypothétique avant l'arrêt de l'exploitation ». Mme Bouayach a affirmé que «le CNDH attire l'attention sur la nécessité d'adopter une stratégie qui s'appuie sur une alerte précoce et rapide concernant les violations des droits économiques et sociaux et ce, compte tenu des conséquences qui pourraient en résulter et qui pourraient parfois entraîner des tensions sociales», poursuivant qu'une action proactive et rapide est d'une importance singulière, particulièrement pour garantir la mise en place de mesures préventives appropriées pour protéger la paix civile. Rédigé durant la période entre décembre 2019 et février 2020 et s'étendant sur une soixantaine de pages, le rapport sur les protestations de Jerada, auquel la Commission régionale des droits de l'Homme de la région de l'Oriental a fortement contribué, présente toutes les données dont le Conseil dispose, notamment celles relatives à l'observation des procès, les travaux de monitoring, de suivi et de l'interaction avec les autorités concernées, la société civile et les catégories affectées, a indiqué la même source. Le rapport présente ainsi 29 conclusions et 36 recommandations formulées sur la base de l'approche droits de l'Homme et du suivi et du monitoring réalisés par la CRDH-Oriental des différentes formes de manifestations et de protestations qu'a connues la ville de Jerada, ainsi que sur la base du suivi par le Conseil des protestations et des revendications de la population. Les recommandations émises par le Conseil se répartissent entre recommandations à caractère général et recommandations à caractères spécifiques adressées aux autorités publiques, au parlement et à la région de l'Oriental, outre les recommandations relatives à l'observation des procès des personnes poursuivies dans le cadre des protestations de Jerada. Parmi ces recommandations figurent l'appel au respect du droit de manifester pacifiquement et le recours à l'interprétation basée sur les droits de l'Homme, indépendamment de la disponibilité de la déclaration ou de la notification, tout en veillant au développement de lignes directrices qui encadrent l'intervention des forces publiques dans ce domaine. Le Conseil attire l'attention aussi sur «la nécessité d'ouvrir un dialogue national sur la question des entreprises et des droits de l'Homme et d'accélérer l'adoption d'un plan national en la matière, dans le cadre de la mise en œuvre des dispositions du Plan d'action national en matière de démocratie et des droits de l'Homme, conformément aux dispositions constitutionnelles pertinentes et aux principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'Homme», conclut communiqué.