De nombreux partis parlementaires sont irrités d'avoir été écartés du cabinet. Ce gouvernement doit encore obtenir l'approbation de l'Assemblée des représentants dans les jours à venir. Second gouvernement en six mois en Tunisie. Le premier ministre désigné, Hichem Mechichi, a annoncé, dans la nuit de lundi 24 à mardi 25 août, la composition des ministères. Après des consultations, il a été décidé de former «un gouvernement de compétences indépendantes qui travaillera à concrétiser des réalisations dans les domaines économique et social», a-t-il déclaré devant la presse. De nombreux partis parlementaires se sont dits mécontents d'avoir été écartés du cabinet, tout en évoquant la nécessité de voter la confiance à ce gouvernement pour éviter d'entraîner le pays, déjà à la peine économiquement, vers des législatives anticipées. Ce gouvernement, qui ne comprend que quelques ministres sortants, compte huit femmes sur vingt-huit ministres et secrétaires d'Etat, dont nombre sont peu connus du grand public. Parmi eux, des hauts fonctionnaires, des universitaires ou des cadres du privé. Le ministère de l'économie a été confié à un patron de banque, Ali Kooli, et les affaires étrangères à Othman Jerandi, un diplomate de carrière ayant déjà occupé ce poste en 2013 avant d'être conseiller diplomatique du président tunisien Kaïs Saïed. Le ministre de la défense, Ibrahim Bartagi, est un universitaire, selon plusieurs médias. Échecs et difficile gestation Hichem Mechichi est le troisième chef du gouvernement désigné depuis les élections législatives d'octobre 2019, qui avaient accouché d'un Parlement éclaté en une multitude de formations antagonistes. Le principal parti, Ennahda, n'a qu'un quart des sièges, et peine à former une coalition. Un premier ministre choisi par Ennahda avait échoué en janvier à convaincre une majorité de députés. Le chef du gouvernement actuel, Elyes Fakhfakh, nommé par le président Kaïs Saïed, a été poussé à la démission en juillet par Ennahda, sur fond de soupçon de conflit d'intérêts. M. Mechichi, actuel ministre de l'intérieur, a lui aussi été choisi par M. Saïed, mais son cabinet ne comprend que quelques ministres sortants. Dans l'attente de l'approbation du Parlement Le sort du gouvernement doit être décidé lors d'une session exceptionnelle du Parlement dans les dix jours qui viennent. Le gouvernement devra alors obtenir le soutien d'au moins 109 députés sur 217. A défaut, le président Saïed, très critique du système parlementaire partisan, pourrait dissoudre l'Assemblée et déclencher des élections anticipées pour début 2021. Ennahda et Qalb Tounès, qui détiennent à eux deux 81 sièges, n'ont pas encore pris clairement position. Le chef d'Ennahda, Rached Ghannouchi, tout en critiquant fermement le choix d'écarter les partis, une décision peu démocratique selon lui, a reconnu dimanche que ces derniers pourraient se résoudre à soutenir le gouvernement pour éviter un nouveau scrutin. «Rejeter ce gouvernement est un problème car cela laisse le pays dans le vide, et voter pour lui est un problème aussi car le gouvernement ne représente pas les partis ni le Parlement», a-t-il déclaré. Près de dix ans après la révolution, la jeune démocratie tunisienne est fragilisée par les luttes de pouvoir paralysant la vie politique, et la précarité de son économie, aggravée par la pandémie qui a fait disparaître des milliers d'emplois.