Dans un clip posté en ligne et intitulée «Bent Mecca» [La Fille de La Mecque »], Asayel Slay salue le courage et la force des femmes vivant dans la ville la plus sainte de l'islam. Pour les autorités de La Mecque, la rappeuse saoudienne a offensé «les coutumes et les traditions du peuple saoudien». Contrastant avec les récentes levées de restriction sur les divertissements dans le royaume ultraconservateur, les dirigeants de la ville sainte ont ordonné, jeudi 20 février, l'arrestation de la rappeuse Asayel Slay. Dans un clip posté en ligne et intitulée Bent Mecca, Asayel Slay, voilée et portant des lunettes de soleil et un piercing dans le nez, salue le courage des femmes vivant à La Mecque, les qualifiant de «bonbons en sucre». « Une fille de La Mecque, c'est tout ce dont vous avez besoin/Ne la contrariez pas, elle vous fera du mal », rappe notamment Asayel Slay, avant de décrire les femmes originaires de la ville la plus sainte de l'islam, comme plus belles et plus fortes que toutes les autres Saoudiennes. Le gouverneur de La Mecque, Khaled Al-Fayçal, a ordonné l'arrestation de la chanteuse, estimant sur Twitter que la jeune femme «offense les coutumes et les traditions du peuple de La Mecque et contredit l'identité et les traditions de sa bien-aimée population». Le clip puis les propos de M. Fayçal ont suscité une vague d'indignation sur les réseaux sociaux. « Je viens de La Mecque et la seule chose que je trouve offensante est votre racisme et misogynie et votre guerre contre une jeune femme », a déclaré sur Twitter un internaute saoudien, en référence notamment au fait que la jeune femme est noire. Derrière le hashtag #You_Are_Not_Mecca's_Girls, certains utilisateurs de Twitter s'en étaient plus tôt pris aux origines africaines de la rappeuse, demandant son emprisonnement, puis expulsion. «C'est typique du gouvernement saoudien : inviter des influenceurs occidentaux pour laver les crimes du régime mais attaquer les véritables femmes saoudiennes qui essaient d'exprimer artistiquement leur identité culturelle», a réagi une autre internaute. Sous l'impulsion du prince héritier Mohammed Ben Salman, homme fort du royaume cherchant à le débarrasser de son image ultraconservatrice, l'Arabie saoudite encourage en effet l'essor des divertissements sur son territoire. Un festival de musique électronique a ainsi été organisé en décembre près de la capitale, auquel ont assisté de nombreuses Saoudiennes, parfois non voilées. Mais cet assouplissement des normes sociales – bien accueilli par les habitants, dont les deux tiers ont moins de 30 ans – s'est aussi accompagné d'une répression des opposants. Les associations et les organisations non gouvernementales ont ainsi dénoncé l'arrestation de journalistes, d'écrivains et de militants en novembre, et le royaume reste scruté par la communauté internationale pour son bilan en matière de droits humains.