Secouée par une révolte pro-démocratie, l'ex-colonie britannique occupe une place centrale dans l'économie chinoise. La crise politique à Hong Kong est susceptible d'avoir des conséquences pires que celles de la crise financière de 2008 sur la Chine. Face à l'ampleur des contestations, Pékin a vite haussé le ton. Cependant, Pékin n'a pas une multitude d'options pour gérer cette crise. Il semblerait que la Chine ne puisse mettre à exécution ses menaces : elle a besoin économiquement de Hong Kong. Depuis son grand retour à l'Empire Céleste, l'ex-colonie britannique ne cesse de vivre une relation amour-haine avec Pékin. Personne à Hong Kong ne nie que la ville ait pu construire sa richesse grâce à son voisin compte tenu de sa position de porte d'entrée. Cependant, Hong Kong est aussi la porte d'entrée des Chinois sur le monde libre. Suite aux mouvements de contestation nés en juin, Pékin ne cesse de menacer Hong Kong. Cependant, il semble que la Chine soit dans l'obligation de laisser courir le mouvement. Hier, une nuée de parapluies a envahi le parc Victoria au cœur de Hong Kong pour témoigner de son soutien à la mobilisation pro-démocratique sans précédent dans l'ex-colonie britannique et ce, en dépit des violences et des menaces d'intervention de Pékin, dont les jets d'eaux pour disperser la foule. Les organisateurs estiment qu'ils étaient 1,7 millions contestataires, soit la plus forte mobilisation depuis des semaines. Née en juin du refus d'un projet de loi controversé autorisant les extraditions vers la Chine, la mobilisation a depuis, élargi ses revendications pour demander l'avènement d'un véritable suffrage universel, sur fond de crainte d'une ingérence grandissante de Pékin. En effet, de plus en plus de personnes ont le sentiment que Pékin cherche à accroître sa mainmise sur Hong Kong. Il s'agit d'une situation prise au sérieux par Pékin en raison la place qu'occupe la région semi-autonome dans son économie. En effet, Hong Kong est un marché économique extrêmement important pour la Chine, avec 1.300 multinationales ayant leur siège dans la ville. Depuis la rétrocession, les accords commerciaux entre la Chine et Hong Kong se sont multipliés. Suite à cela, la valeur des importations et des exportations entre les deux économies ont connu une forte augmentation. D'après le Conseil de développement du commerce de Hong Kong, les investissements de la Chine dans le marché hongkongais sont passés de 10% en 1997 à près de 40% en 2015. Certes, le PIB de Hong Kong ne représente plus que 3% de celui de la Chine, contre près de 18,5% en 1997, d'après des données de la Banque mondiale. Mais, la crise politique dans l'ex-colonie britannique pourrait avoir des conséquences pires que celles de la crise financière de 2008, comme l'a récemment souligné Carrie Lam, la cheffe pro-Pékin de l'exécutif local. «Un tel ralentissement ne devrait pas être sans conséquence pour Pékin», a-t-elle précisé. Dans une analyse pour l'Institut Peterson d'économie internationale, Tianlei Huang, économiste universitaire, a souligné que Pékin « a développé des intérêts économiques et commerciaux énormes dans ce territoire. Les dirigeants chinois se rendent compte que, pour assurer sa propre prospérité, la Chine a toujours besoin d'un Hong Kong capitaliste ». Willy Lam, analyste à l'université chinoise de Hong Kong, a fait savoir que plusieurs investisseurs chinois détiennent des fonds dans les banques hongkongaises et ont directement investi dans l'immobilier, des entreprises ou des commerces à Hong Kong. Ils ne veulent pas que le marché boursier et le marché immobilier s'effondrent. » D'après le classement 2019 de la Banque mondiale sur la facilité à faire des affaires, Hong Kong est classé 4ème alors que la Chine est classée 46ème. Suite à cela, plusieurs entreprises chinoises préfèrent s'installer à Hong Kong compte tenu de la grande facilité avec laquelle les capitaux peuvent y circuler contrairement au reste du pays qui ne bénéficie pas de la même souplesse réglementaire. Selon le Conseil de développement du commerce de Hong Kong (HKTDC), près de 60% des investissements en provenance de Chine passent par Hong Kong. S'agissant des mouvements boursiers, depuis 1986, neuf des dix plus grosses introductions en bourse à Hong Kong sont des entreprises chinoises. D'ailleurs, Alibaba Group, la plus grande plateforme de commerce B2B en ligne au monde, envisage une seconde cotation dans l'ancienne colonie britannique. Si ce mouvement de contestations perdure, les entreprises chinoises présentes à Hong Kong risquent de souffrir éternellement des retombées économiques négatives de cette crise politique. De plus, les entreprises étrangères basées à Hong Kong et qui échangent avec Pékin seraient amenés à quitter le territoire, ce qui impacterait grandement l'économie de la Chine.