Lhoussaine Louardi, ministre de la santé, veut passer à la vitesse supérieure et enlever plusieurs épines du corps pharmaceutique marocain. C'est en tout cas l'impression qu'il a voulu véhiculer lors d'une rencontre-débat organisée, mardi 26 juin à Casablanca, en présence des différents acteurs œuvrant dans le secteur. Officinaux, industriels et distributeurs ont été au rendez-vous afin de rappeler les maux qui gangrènent cette activité depuis des années. Dans sa grande introduction de la future politique pharmaceutique du Royaume, le professeur Louardi a insisté sur le fait que la réforme du secteur doit être assise de façon consensuelle. «Nous ne voulons plus jouer le rôle de monopole, nous nous présentons plutôt en tant que garant de vos droits». Par ailleurs, M. Louardi a insisté sur l'éventuelle généralisation du système du Ramed de façon à ce que les officinaux en profitent autant que les hôpitaux. Pour lui, «il est anormal que le RAMED stagne au niveau des hôpitaux. Ce ne sont pas des ghettos pour les pauvres et l'implication des pharmaciens est importante». M. Louardi n'a pas manqué de mettre le point sur l'inaccessibilité du citoyen aux médicaments : «Au-delà des ruptures incessantes des stocks et l'absence du système du tiers payant qui mettent à mal la situation des plus démunis, les médicaments restent chers au Maroc. Cette situation est injustifiable et inacceptable. Il faut qu'elle soit corrigée par l'ensemble des intervenants». Cet avis n'est pas partagé à l'unanimité par les officinaux présents lors du débat chez qui on trouve un autre son de cloche (voir encadré p 5). Ils s'insurgent contre la taxe qui leur est imposée alors qu'elle est moindre chez les cliniques et totalement inexistante chez les médecins. «Cette taxe est une euthanasie pour les pharmaciens. Le tiers des officinaux au Maroc ont déclaré faillite, le reste survit difficilement. Il faut remédier à cela», note un pharmacien de la ville de Mohammedia. M. Louardi ne semble pas contredire ces professionnels et dit espérer pouvoir instaurer un système de remboursement des pharmaciens à l'instar de la CNAM en France. «Nous comptons également revoir la question de l'abattement fiscal au même titre que celle des marchés publics des médicaments au Maroc. Il me semble avoir sensibilisé mon collègue (Abdelkader Amara, ministre de l'Industrie, ndlr) sur ce point», rassure-t-il tout en qualifiant d'anormale la disparition de quelques produits indispensables sur le marché. Par ailleurs, et afin de pallier à ce problème de rupture de stocks et de dépendances des laboratoires internationaux, le ministre de tutelle se dit «totalement favorable au droit de substitution». Il revient cependant sur l'anomalie que connaît le paysage pharmaceutique marocain qui consiste en la désorganisation du conseil de l'Ordre des pharmaciens. «C'est alarmant, ce conseil est dans l'illégalité totale». Voulant accélérer les faits, M. Louardi a promis de mettre en application dans les plus brefs délais la loi 17-04 régissant le secteur. En revanche, ce texte continue à susciter la réticence des professionnels dans la mesure où le pharmacien y est aligné au droit commun. L'un des concernés, en s'adressant au ministre, revendique que cette mise en application soit freinée. «Il faut attendre que la loi 17-04 soit d'abord amendée de façon à nous garantir nos droits».