«Il s'agit d'un texte juridique global et non d'une loi spécifique pour protéger les filles mineures. Il ne constitue pas une stratégie pour abolir cette pratique». Au Maroc, entre 60.000 et 80.000 filles âgées de 8 à 15 ans sont exploitées en tant que domestiques. Des chiffres alarmants qui traduisent l'ampleur du phénomène dans notre pays. Depuis sa création en 2009, le Collectif pour l'éradication du travail des petites bonnes, qui regroupe 34 associations, mène un rude combat pour éradiquer ce fléau. Devant les maigres mesures adoptées par le gouvernement dont un projet de texte de loi global réglementant «les conditions d'emploi du personnel de maison», le collectif a décidé de passer à la vitesse supérieure. Une journée de réflexion sur la stratégie de plaidoyer pour l'abolition du travail des «petites bonnes» sera organisée le samedi 26 mai à Rabat. L'objectif étant de débattre des mesures à prendre pour mettre fin à cette pratique contraire aux dispositions des textes internationaux et nationaux sur le respect des droits de l'enfant. Le Collectif estime que le projet de texte de loi présente plusieurs défaillances pour garantir la protection des enfants et la promotion de leurs droits. «Il s'agit d'un texte juridique global et non d'une loi spécifique pour protéger les filles mineures. Il ne constitue pas une stratégie pour abolir cette pratique», déplore Omar Saâdoun, coordinateur du Collectif. Pour les associations membres du Collectif, ce texte est censé constituer une loi spécifique telle que prévue dans l'article 4 du Code du travail promulgué depuis 2004. Ce qui n'est pas le cas. Autres limites dénoncées par le Collectif : le texte en question n'oblige pas les personnes au courant de cas de «petites bonnes» à informer les instances ayant l'autorité d'intervenir sur le lieu de leur «exploitation». En outre, le projet de loi ne traite pas du mode et des conditions de retrait et d'accueil des «petites bonnes» retirées du lieu d'exploitation pour les préparer à leur réinsertion dans des structures adaptées. Le Collectif dénonce aussi le fait que le texte ne traite pas des dispositions légales et pratiques de réinsertion des petites filles dans leur famille et dans l'école. La responsabilité explicite de l'Etat dans la prise en charge de ce processus comprenant le retrait, la remise en état, la réinsertion et le suivi ne figurent pas dans le projet de loi. Le Collectif reproche l'absence de dispositions mettant en cause la responsabilité des parents qui mettent leurs filles mineures en «location». Par ailleurs, le coordinateur du Collectif estime que les sanctions prévues par le projet de loi ne sont pas assez lourdes et qu'une révision s'impose. Rappelons que l'article 18 prévoit une amende de 25.000 à 30.000 DH pour toute personne qui fait travailler une employée de maison de moins de 15 ans. En cas de récidive, l'amende est doublée et une peine de prison de un à trois mois ou l'une de ces deux punitions. Est puni d'une amende de 20.000 à 50.000DH tout intermédiaire dans l'emploi d'une personne de moins de 15 ans. En cas de récidive, l'amende est doublée et une peine de prison de un à six mois ou l'une de ces deux punitions est prévue.