«Nous ne voulons pas que le ministre fasse une quelconque pression sur la justice. Loin de là. Nous voulons une justice neutre et indépendante». L'affaire des deux infirmières incarcérées à la prison de Mohammedia continue de faire parler d'elles. Celle-ci pourrait évoluer et prendre une autre tournure durant les prochains jours. Contacté par ALM, Dr Mostafa Chanaoui, secrétaire général du Syndicat national de la santé, affilié à la CDT, affirme qu'«elles devraient être prochainement libérées sous caution. L'avocat du barreau de Mohammedia que nous avons désigné, a déposé la semaine dernière, une demande de liberté sous caution. Nous attendons toujours la décision de la justice». Dans le cas où les deux infirmières ne seraient pas mises en liberté, les quatre centrales syndicales à savoir l'UGTM, la CDT, la FDT et l'UNTM, entendent poursuivre leur mouvement de protestation. Suite à l'incarcération des deux jeunes femmes, une grève nationale dans le secteur de la santé avait été observée le 17 mai. Parallèlement, une grève continue a débuté le 15 mai au niveau de toutes les structures de santé de Mohammedia ,à l'exception des services d'urgences. Des débrayages qui ont suscité la réaction du ministère de la santé. Jeudi dernier, Lhoussaine Louardi, le ministre de la santé a souligné que son département ne pouvait interférer dans l'action du pouvoir judiciaire. «Nous ne pouvons intervenir dans le travail du juge qui peut convoquer toute personne, mais il est de notre devoir de défendre les fonctionnaires poursuivies», a-t-il indiqué. Et d'ajouter que «ni lui-même, ni quiconque d'autre ne peut intervenir pour réclamer la poursuite en liberté des deux mises en cause». Une réaction jugée «négative» par les syndicats. «Nous ne nous attendions pas à de telles déclarations de la part du ministre. Nous ne voulons pas qu'il fasse une quelconque pression sur la justice. Loin de là. Nous voulons une justice neutre et indépendante», poursuit Dr Chanaoui. Les syndicats veulent tirer au clair cette affaire. «Les poursuites à l'encontre des deux infirmières pour corruption et dissimulation sont non fondées. L'enquête doit se poursuivre pour savoir ce qui s'est réellement passé. Si elles sont coupables alors elles seront punies pour le délit qu'elles ont commis. Mais pour l'instant, il n'existe aucun élément qui prouve qu'elles ont été corrompues. Et par conséquent, nous ne comprenons pas pourquoi elles sont toujours en prison», souligne-t-il. En attendant les conclusions de l'enquête, les quatre centrales syndicales demandent l'ouverture d'un véritable débat portant sur plusieurs questions notamment sur les droits et la protection du personnel de santé avec les ministères de la santé, de la justice et de la fonction publique. «Nous avons envoyé plusieurs lettres aux trois départements ministériels mais sans réponse à ce jour», déplore Dr Chanaoui. Rappelons que les deux infirmières qui exerçaient à la maison d'accouchement de Aïn Harrouda sont détenues depuis près d'un mois. L'affaire éclate suite à une usurpation d'identité. La première femme qui a accouché, une prostituée et célibataire a usurpé l'identité de sa sœur avec son consentement. Quatre mois plus tard, sa sœur mariée accouche d'un enfant dans la même structure et inscrit son enfant sur le registre de l'Etat civil. Le fonctionnaire de l'Etat civil découvre alors à deux reprises la même identité de la mère qui a accouché. Ce qui l'interpelle. Il est impossible qu'une même personne donne naissance à deux bébés en quatre mois. L'équipe médicale de la maison d'accouchement mène alors une enquête. Après investigations, l'équipe découvre que le nom de cette même personne a été enregistré à deux reprises. Les responsables de la maison d'accouchement de Aïn Harrouda avisent le délégué du ministère de la santé et la gendarmerie. Les deux infirmières sont alors auditionnées par la gendarmerie. Le parquet ordonne leur arrestation au lieu de soumettre l'affaire à la justice.