Cinq partis de gauche se sont réunis le 23 août. Une autre réunion prévue le 29 sera élargie à cinq autres partis. La fièvre électorale commence à se faire sentir. Rassemblement par-ci, regroupement par-là ou encore coordination, uniformisation de points de vue…peu importe la forme et l'appellation que cela prend, ce qui est sûr c'est que les partis sont en train de jouer à fond la carte des alliance pour tenter de se repositionner sur l'échiquier et se préparer aux prochaines élections. Après l'initiative d'il y a quelques jours du RNI, PAM, UC et MP et les tentatives de relance de la Koutla démocratique, c'est au tour des partis de gauche d'appeler aujourd'hui à la reconstitution d'une grande famille de gauche. Mardi 23 août, l'USFP, le PS, le PPS, le FFD et le Parti de la gauche verte ont tenu une réunion à ce sujet à Rabat. A l'ordre du jour, examiner d'éventuelles actions communes que peuvent entreprendre les partis pour les élections et les possibilités de coordination. A l'issue de cette réunion, les cinq partis ont décidé de mettre sur pieds une commission technique qui sera chargée d'établir une première plate-forme pour l'action commune et un ordre du jour pour une nouvelle réunion qui devra avoir lieu lundi 29 août. Pour donner plus d'ampleur à cette démarche, les cinq partis ont décidé d'élargir le cercle à d'autres partis de gauche en conviant notamment le Parti travailliste, le PSU, le PADS et le CNI à la prochaine rencontre. Contactés par ALM, les responsables des cinq partis affirment que cette initiative «n'est pas une réaction conjoncturelle», qu'elle «n'obéit pas à des calculs électoralistes étriqués» mais qu'elle vise des objectifs plus globaux. Les cinq partis s'acheminent-ils vers la mise en place d'un grand pôle de gauche, un rêve que nourrissent depuis longtemps certains militants gauchistes ? La réunion entre les cinq partis et une éventuelle adhésion d'autres composantes de la gauche ouvriront-elles la voie vers l'unification de la gauche ? Des personnes présentes à cette réunion affirment que cette question a bien été à l'ordre du jour de la rencontre et débattue. Mais les patrons des partis concernés préfèrent ne pas brûler les étapes. «Nous ne sommes pas encore à ce stade. Nous avons échangé des points de vue lors de cette rencontre et nous en tiendrons une autre lundi prochain à propos des perspectives de coordination», précise Nabil Benabdellah, secrétaire général du PPS. «C'est pour cette raison que nous n'avons pas publié de communiqué à l'issue de cette rencontre. Nous attendons la réponse des autres partis de gauche que nous avons conviés à la prochaine réunion», souligne-t-il. Du côté de l'USFP on estime également qu'il est encore prématuré de parler de la mise en place d'un grand pôle de gauche. «Ce n'est que le début du débat au sujet de l'alliance de la gauche. Il faudra que certaines conditions soient réunies en premier lieu, notamment le rétablissement du climat de confiance», précise Hassan Tarek, membre du bureau politique de l'USFP. Même son de cloche auprès du FFD. «Tous les dirigeants ont exprimé leur volonté d'aller de l'avant. Nous sommes conscients du fait que le pays a besoin d'une gauche forte. Mais il ne faut pas aller trop vite sur cette question», indique Thami Khiari, secrétaire général du FFD. Et d'ajouter que «l'idée d'un grand pôle de gauche est réalisable sur le plan politique mais elle nécessite du temps». Les cinq partis de gauche sont, par ailleurs, conscients de l'importance de l'unification de leur voix pour pouvoir relever les défis de l'étape de la transition démocratique. «La mise en place de pôles forts est de nature à contribuer à la moralisation de la vie politique. Les gauchistes et les démocrates sont appelés à jouer pleinement leur rôle dans ce sens à travers la mise en place d'un grand pôle de gauche», affirme Mohamed Farès, coordinateur général du Parti de la gauche verte, appelant les gauchistes et les démocrates «à capitaliser les sacrifices qu'ils ont présentés dans le passé». Ceci dit, la question qui se pose à propos de cette initiative de coordination regroupant l'USFP et le PPS est celle de savoir si un éventuel grand pôle de gauche constituerait une alternative à la Koutla ? Sur ce point, le PPS et l'USFP tiennent à rassurer. «Le pôle de gauche n'est pas une alternative à la Koutla. Il s'agit d'un complément», souligne M. Benabdellah. «D'ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que la gauche n'est pas majoritaire. Il y a lieu de la renforcer en s'ouvrant sur d'autres alliances et la Koutla reste le cadre le plus proche», note-t-il. «Pour nous, il n'y a pas de contradiction entre les deux registres. Notre ouverture sur les partis de gauche est complémentaire vis-à-vis de la Koutla», indique, pour sa part, M. Tarek. Selon les observateurs, la réunion du lundi prochain entre les cinq partis de gauche et d'autres partis est de nature à donner plus de visibilité sur cette initiative de coordination. L'Istiqlal lâché par ses alliés de la Koutla ? L'USFP et le PPS affirment qu'un éventuel pôle de gauche ne constituerait pas une alternative à la Koutla et ne signifie pas la mort de cette dernière. Ces deux partis soulignent que leur adhésion à la dynamique d'unification de la gauche n'est pas de nature à remettre en cause leur attachement à ce bloc. Le parti de l'Istiqlal est du même avis. Le parti dirigé par Abbas El Fassi ne voit pas d'un mauvais œil le rapprochement entre ses alliés et les autres partis de gauche. «Toute tentative de rassemblement des forces politiques autour des pôles est une action louable. Une mesure de genre s'inscrit dans le cadre des exigences de la nouvelle Constitution», souligne Abdelkader El Kihel, membre du bureau exécutif du parti de l'Istiqlal. «L'USFP et le PPS n'ont jamais cessé d'entamer des contacts avec les autres partis de gauche même lorsque la Koutla était en plein forme. Il y a une sorte de complémentarité entre la gauche et la Koutla et non pas de contradiction», indique M. El Kihel. Ce dernier affirme, dans ce sens, que la Koutla est prête à s'ouvrir sur d'autres forces politiques. «La Koutla n'est pas un club fermé. Les partis politiques nationaux peuvent y adhérer. Il est temps d'unir les voix des démocrates malgré la divergence des référentiels», souligne-t-il.