Un internaute qui s'était filmé en train de brûler les pages d'un exemplaire du Coran a expliqué lundi devant le tribunal correctionnel de Strasbourg avoir voulu faire de «l'humour». Le procureur Gilles Delorme a requis contre lui trois mois de prison avec sursis et 1.000 euros d'amende pour provocation à la haine raciale et religieuse. «Calimero», le pseudonyme du prévenu sur la toile, apparaissait dans une longue séquence vidéo, déchirant des pages du Livre Saint de l'Islam puis confectionnant un avion avec l'une d'elles qu'il lançait sur deux boîtes dressées comme les tours jumelles de New York. D'abord caché sous un masque de diable, puis à visage découvert, ce Français de trente ans d'origine chilienne finissait par brûler l'ouvrage sur son balcon. «Je faisais des émissions humoristiques. Beaucoup de personnes ont trouvé ça drôle», a-t-il dit au tribunal. Le jeune homme sans activité à l'automne dernier, quand se sont produits les faits, se déclare aujourd'hui gérant d'une entreprise informatique. Il assure qu'il ne voulait «pas nécessairement envoyer un message» mais seulement relever un défi. Les menaces d'autodafé du Coran proférées par le pasteur fondamentaliste américain Terry Jones agitaient alors le monde musulman. Un internaute lui avait dit qu'il n'aurait pas le courage de commettre cet acte. «Calimero» ne comprend pas pourquoi il est poursuivi. «J'étais juste chez moi à faire des conneries avec mes amis», affirme-t-il. Avocat de la Licra, la Ligue contre le racisme et l'antisémitisme, Me Raphaël Nisand a dénoncé «une volonté, avec cette mise en scène, de jeter le discrédit sur les musulmans». Il a rappelé que le passage à l'acte du pasteur américain avait provoqué une vague de violence en Afghanistan et s'est félicité qu'en France, la loi et non la vengeance individuelle sanctionne ce type d'infraction. «Ses idées, il peut les avoir pour lui-même. Ce qui est inadmissible, c'est qu'il les véhicule par des moyens de communication», a ajouté l'avocat. Pour Me Renaud Bettcher, avocat de la défense, a réfuté toute provocation à la haine raciale. «C'est une stigmatisation des intégristes musulmans et pas des musulmans au quotidien», a-t-il dit. «Depuis 1789, le blasphème n'existe plus en France», a conclu l'avocat en demandant la relaxe.