Avec lui, l'Istiqlal est parvenu à sauvegarder sa cohésion et à perpétuer sa philosophie. Mais, l'homme reste controversé. Itinéraire. Pour certains, Abbas El Fassi est un homme qui a donné un coup de jeune au parti de l'Istiqlal. Pour d'autres, il n'a pas su remplacer un M'Hamed Boucetta rompu à l'art de la manœuvre politique. Une chose est sûre : l'Istiqlal avec M. El Fassi est parvenu à sauvegarder sa cohésion et à perpétuer sa philosophie. C'est l'essentiel aux yeux de nombre de cadres du vieux parti du Maroc. Avocat de carrière, l'ex-ambassadeur du Maroc à Paris était à bonne école. Diplomate chevronné, politique brillant, Abbas El Fassi, la soixantaine joviale, n'a pas l'esprit retors. Il a un certain franc parler propre à lui, lui permettant de développer un discours très istiqlalien. L'héritage du parti avec ses dogmes et ses principes, on ne peut pas dire qu'il ne le défend pas. Bien au contraire. Il en est pétri jusqu'au bout des ongles. N'est-il pas le cousin et le gendre de Allal El Fassi ? Avant de devenir ministre du pôle social dans le gouvernement Youssoufi, Abbas El Fassi avait campé une position d'opposant à l'action gouvernementale qui a longtemps agacé Abderrahmane Youssoufi et les autres alliés de la majorité. Un pied dans le gouvernement et un autre de l'opposition ? Une ambivalence qui cache des arrières-pensées ? Le leader de l'Istiqlal s'en est toujours défendu avec véhémence, expliquant sans trop convaincre qu'il s'agit d'un “soutien critique“ destiné, non pas à gêner l'action gouvernementale, mais à la rendre plus vigilante et plus efficace. À partir de cette approche jugée moins honnête, l'Istiqlal, par la voix de son chef, a reproché à l'exécutif sa timidité et sa mollesse. Exemples : absence de mesures symboliques à effet psychologique fort comme le gel des salaires des hauts fonctionnaires ou le retard de l'ouverture de grands chantiers de réforme… En fait, l'Istiqlal avait beau rôle de tenir un tel discours qui s'apparente à une posture esthétique. Or, dès que Abbas El Fassi a fait son entrée au gouvernement à la suite du remaniement ministériel du 6 septembre 2000, le soutien critique a cessé comme par enchantement. Certains observateurs ont à ce moment-là fait remarquer que Abderrahmane Youssoufi, en fin politique, a exprès impliqué le patron de l'Istiqlal dans le gouvernement pour faire taire ses critiques “qui commençaient à bien faire“. Le prix d'une trêve dans les rapports conflictuels entre les deux frères-ennemis, l'USFP et l'Istiqlal, notamment depuis le démarrage de l'expérience de l'alternance en mars 1998. origine de cette crise, il semblerait que l'Istiqlal n'a jamais avalé le fait que la primature revienne à l'USFP. Celui-ci a son tour a toujours accusé mezza voce son allié encombrant de ne pas soutenir l'action gouvernementale pour en pas en assumer le bilan. Tant il est vrai que dans l'esprit des citoyens, seul le parti de M. Youssoufi, étant donné qu'il est la locomotive de l'exécutif, est comptable des résultats des années au pouvoir. De là à dire que l'Istiqlal s'est désolidarisé avec le gouvernement pour mieux rebondir lors des élections de septembre 2002, il n'y a qu'un pas que certains ont vite franchi. Uns manière de préparer d'ores et déjà un retour en force dans le prochain gouvernement avec à sa tête une personnalité istiqlalienne.