Les deux ministres ne sont pas faites pour s'entendre. Dans l'attelage de la santé et aux sports, chacun tire de son côté. Pour les documentalistes de l'instantané, il s'avère très difficile de trouver une photo regroupant, en complicité et en affection, les deux dames, Rama Yade secrétaire d'Etat aux Sports et sa ministre de tutelle à la Santé, à la Jeunesse et aux Sports Roselyne Bachelot. Tant la relation entre les deux personnages est glaciale et frôle chaque jour la rupture et le pugilat. Le Mondial de l'Afrique du Sud qui commence ce vendredi va donner à Rama et à Roselyne l'occasion de déployer la palette de leurs sentiments très contrastés. Un avant-goût est déjà donné par la grande polémique dégoupillée par Rama Yade lorsque, publiquement, elle a critiqué le luxe trop bling bling de l'hôtel dans lequel ils ont choisi de s'installer. Avec une saillie d'une mordante franchise : «J'attends que l'équipe de France nous éblouisse par ses résultats plutôt que par le clinquant des hôtels. Moi, je les ai appelés à la décence en temps de crise». Ce à quoi Roselyne Bachelot, endossant son costume de pompier pour éteindre la polémique, s'est empressée de répondre : «Il n'est plus temps de faire des polémiques (…) Maintenant, allez, stop! On est derrière notre équipe, elle en a besoin». C'était la seconde fois en quelques jours où Rama Yade et Roselyne Bachelot se trouvent sur des rives opposées. Récemment, lors du choix du pays chargé d'organiser l'Euro 2016, quand la France, en présence de Nicolas Sarkozy, fut choisie, chacune avait essayé de tirer la couverture à elle en taclant sa rivale. Chacune tentait de s'approprier les mérites d'une telle performance, une des rares bonnes nouvelles pour Nicolas Sarkozy depuis des lustres. Les deux ministres ne sont pas faites pour s'entendre. Dans l'attelage de la santé et aux sports, chacun tire de son côté. Ce qui complique davantage la tâche et agrémente le tableau, c'est que Rama Yade et Roselyne Bachelot ont déjà, dans une autre vie ministérielle, expérimenté la cohabitation pimentée. Rama Yade, lorsqu'elle officiait aux Droits de l'Homme, traversa une des phases les plus tendues de sa jeune carrière au Quai d'Orsay sous la houlette de Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères. Sa passion favorite était de brider la fougue de sa jeune secrétaire d'Etat, trop indépendante, trop novice et surtout trop gourmande. La ténacité de Bernard Kouchner fut telle qu'il parvient à convaincre Nicolas Sarkozy de supprimer le secrétariat d'Etat aux Droits de l'Homme. Rama Yade fut rétrogradée aux Sports. Elle en garde une silencieuse frustration et une glaciale rancune. Quant à Roselyne Bachelot, ses mésententes avec le prédécesseur de Rama Yade aux Sports, l'ancien sélectionneur du Quinze de France, Bernard Laporte, avaient fait le bonheur des chroniqueurs politiques et des chansonniers. Dans cette relation très marquée, Roselyne Bachelot campait le rôle d'une sadique, urbaine et hautaine, tandis que Bernard Laporte incarnait le Gaston La gaffe qui débarquait de sa province. Rama Yade et Roselyne Bachelot, de part leurs fonctions, sont obligées d'accompagner l'équipe de France en Afrique de Sud. La presse s'est déjà faite l'écho d'une grande divergence sur leur agenda de supportrices. Les deux sont suffisamment aguerries et ambitieuses pour user des coups de coude, ou pour récupérer une victoire ou se délester d'un échec.