Surprenant Bernard Kouchner. Le ministre des Affaires étrangères français a causé un mini scandale, la semaine passée, en déclarant « qu'il y a une contradiction permanente entre les droits de l'homme et la politique étrangère d'un Etat, même en France ». Parlait-il en général ? Pas vraiment. Le chef de la diplomatie française, quoiqu'il en dise, visait directement sa pétulante et très douée Secrétaire d'Etat aux Droits de l'homme, Rama Yade, 31 ans. Une attaque très mal reçue par une opinion publique qui ne déteste pas le franc-parler de la jeune femme et n'aime guère la voir, de façon fort inélégante, accabler par son ministre de tutelle au moment où elle traverse, politiquement, une passe difficile. Tirer sur les ambulances n'est jamais bien vu, le french doctor est mieux placé que quiconque pour le savoir. Sa côte de popularité est tombée de 9 points. Celle de Rama Yade, elle, n'a pas fléchi. Son tort ? Avoir tenu tête à Nicolas Sarkozy qui voulait qu'elle accepte pour six mois le secrétariat d'Etat aux Affaires européennes à la place de Jean-Pierre Jouyet, puis se fasse élire, en juin 2009, au Parlement européen de Strasbourg, sur la liste UMP de l'Ile de France. Mais Rama Yade ne veut pas quitter Paris. Elle a de grandes ambitions et lorgne sur le Parlement français. Kouchner, lui, ne semblait guère ravie de la trouver aux Affaires européennes et a peut-être « tué » son secrétariat d'Etat aux Droits de l'homme. « J'ai eu tort de proposer à Nicolas Sarkozy de le créer » a-t-il expliqué à quelques journalistes. Bernard Kouchner voit deux grands handicaps à cette création. Le premier : son titulaire est souvent en porte-à-faux avec la politique officielle. Ce n'est pas faux. On se souvient de Rama Yade déclarant lors de la visite du colonel Kadhafi à Paris que « la France n'est pas un paillasson sur lequel un dirigeant, terroriste ou non, peut venir s'essuyer les pieds du sang de ses forfaits ». Une déclaration osée de la part d'un membre du gouvernement mais qui n'était pas forcèment pour déplaire à tous les Français et permettait à l'Elysée de ménager la chèvre et le chou. Par contre, lorsque le président français ira en visite officielle à Tunis, Rama Yade fut prié de se taire. De même, elle ne sera pas du voyage à Pékin, l'été dernier, alors que le torchon brûlait, précisèment sur les droits de l'homme au Tibet, entre la France et la Chine. Second argument de Bernard Kouchner : pour être efficace, mieux vaut avoir l'autorité d'un ministre des Affaires étrangères pour obtenir le respect des droits de l'homme dans un pays tiers qu'être un simple secrétaire d'Etat. L'argument est ausii recevable. A la condition que le chef de la diplomatie veuille bien soccuper des sujets qui fâchent. On ne peut en douter venant de Kouchner. Certes, on a compris qu'un secrétariat aux Droits de l'homme ne peut pas faire de miracle. Mais une chose est sûre : le fait qu'il existe ne peut nuire aux Droits de l'homme et reste le meilleur moyen pour ne pas les oublier si d'aventure, un ministre des Affaires étrangères ne s'en souciait pas. Alors dans le doute....