Le président de la République aurait pu traiter ces attaques contre sa vie privée avec le silencieux mépris des indignés et passer à autre chose. C'est finalement une rumeur malveillante sur les infidélités du couple présidentiel qui tombe à pic, pourront dire des mauvaises langues acérées dans un cynisme urbain. La preuve, cette grande question non dénuée de bon sens : qu'aurait fait le président de la République après une séquence électorale remplie de mésaventures, qui a vu son leadership remis à plat et les mesures qu'il préconise pour redonner espoir de victoire à sa propre famille politique partir en fumée ? Cette rumeur sur un éventuel complot ourdi par des forces obscures dotées d'une puissance financière pour déstabiliser la tête de l'Etat a été jugée comme l'occasion rêvée pour tenter de reprendre la main, jouer les martyrs persécutés, bref occuper l'ensemble de la scène politique au point de faire passer les autres événements, y compris ceux qui interpellent la gouvernance de Nicolas Sarkozy, comme des gesticulation insignifiantes. Quand l'honneur et l'intégrité du chef de l'Etat sont en danger, plus rien ne compte. Le président de la République aurait pu traiter ces attaques contre sa vie privée avec le silencieux mépris des indignés et passer à autre chose, partant du principe de base qu'une fois il avait choisi d'épouser une femme qui attire naturellement autant de lumières et de curiosités que Carla Bruni, sa vie conjugale et privée n'allait pas être un long fleuve tranquille. Il avait d'autant plus de raisons de ne pas sur-réagir à cette affaire qu'elle a été reprise et commentée dans son ensemble dans la presse étrangère, traditionnellement encline à ne pas respecter les codes d'usage hexagonaux. La presse française était restée étrangement muette sur le site du «Journal du Dimanche» qui avait dégoupillé cette grenade. Elle s'est contentée de suivre et de répercuter les accusations portées contre certains personnages soupçonnés par l'Elysée de nourrir cette rumeur sur les infidélités respectives de Nicolas et de Carla, comme l'ancienne garde des Sceaux Rachida Dati ou l'ancien Premier ministre de Jacques Chirac, Dominique de Villepin. D'ailleurs à ce sujet, la rancune de Nicolas Sarkozy à l'encontre de Rachida Dati doit être si épaisse au point où deux proches du président, le secrétaire général de l'Elysée Claude Guéant et le conseiller en communication Pierre Charon affirment à la presse que Nicolas Sarkozy ne veut plus la voir ni lui parler. Il a été affirmé à plusieurs reprises que la police disposerait d'éléments «probants» (textos, conversations téléphoniques) qui montreraient le rôle de Rachida Dati dans la propagation de ces rumeurs. Ce à quoi l'ancienne ministre de la Justice répond, droit dans ses «Christian Louboutin», qu'elle garde toujours la confiance du président de la République. Si cette réaction de l'Elysée à cette rumeur et cette volonté affirmée que «la peur change de camp» pour reprendre l'expression de Pierre Charon, conseiller en communication, parvient pendant un moment à élever un rideau de fumée, il n'est pas certain qu'elle serve à termes l'image du président de la République. Ses détracteurs, à droite comme à gauche, lui ont souvent reproché de dévaloriser la fonction présidentielle. Poursuivre une rumeur n'est pas de nature à la rehausser.