«Le président Fillon» comme l'appelle dans une tentative ouverte de provocation le magazine «Le point», est directement entré, avec ce sondage, dans l'œil du cyclone. La plus mauvaise nouvelle que Nicolas Sarkozy pourrait recevoir par ces temps incertains ne serait pas une défaite annoncée aux régionales, ni une rébellion de sa propre famille politique contre sa politique de l'ouverture poussée jusqu'à son stade irrationnel, ni les couacs répétitifs de son gouvernement, ni même que la gauche remonte dans les sondages et s'approche davantage de l'ultime but de formuler une alternative pour 2012. Non, la plus mauvaise nouvelle serait que son propre camp commence à faire les yeux doux à quelqu'un d'autre de son propre entourage. Et cela vient d'arriver pour la première fois lorsqu'un sondage publié par le magazine «Le point» qui ne brille pourtant pas par son anti-Sarkozyme acharné comme le ferait un hebdomadaire comme «Marianne», selon lequel le Premier ministre François Fillon s'imposerait comme une alternative présidentielle crédible au cas où, comble des miracles, Nicolas Sarkozy déciderait de ne pas solliciter un second mandat à l'Elysée. Même si ce constat a quelque chose de fracassant, il ne constitue guère une surprise. Cela devait un jour arriver. A force de décrire la bonne santé « sondagière» de François Fillon en comparaison directe avec celle moribonde de Nicolas Sarkozy, le report d'affection et de désirs politiques finirait bien un jour par opérer. «Le président Fillon» comme l'appelle dans une tentative ouverte de provocation le magazine «Le point», est directement entré, avec ce sondage, dans l'œil du cyclone. Lorsque Nicolas Sarkozy venait sur les plateaux de télévision assurer les chaumières, inquiètes, de ses relations harmonieuses avec son Premier ministre, alors que les clichés politiques du moment décrivaient à loisir une marginalisation et un bannissement du Premier ministre, François Fillon campait ce personnage sinistré qu'une sciatique réelle et psychologique avait plombé, tout juste apte à annoncer les mauvaises nouvelles. La comparaison entre les deux tempéraments ne souffrait d'aucune hésitation. Au président dynamique, multidirectionnel, le bagout d'un talentueux représentant commercial, la santé et l'électricité d'un athlète, les ambitions insatiables d'un affamé de performances, s'opposait l'image de ce «collaborateur» taciturne au débit de parole et à la coupe de cheveux «Vieille France» et dont les sourcils pompidoliennes terniraient davantage le visage et assombrissaient la démarche. Aujourd'hui, ce Premier ministre contrit, à force de travailler ses silences, de déguster sa solitudes, d'avaler toutes sortes de couleuvres, est celui qui commence à faire de l'ombre à Nicolas Sarkozy. Leurs relations ne sont pas aussi idylliques que le décrit la fable républicaine vendue par l'Elysée, mais leurs tensions ne sont pas aussi fortes que ne le laisse supposer une cohabitation qui transformerait Matignon en camp retranché. L'homme espérait faire un quinquennat complet. Le sondage du «Point» avec ses dommages psychologiques collatéraux, peut aisément pousser le président de la République à profiter des élections régionales pour récrire une autre partition qui libérera François Fillon de son statut de «collaborateur» mais qui a fini par séduire là où il fallait se contenter de servir.