Selon Lahcen Daoudi, les différentes composantes de l'opposition travaillent chacune dans son espace, avec chacune une approche différente. ALM : Quelle est la particularité de l'opposition au Maroc ? Lahcen Daoudi : L'opposition au Maroc n'a pas la possibilité de mener à bien sa mission face à un gouvernement qui ne respecte pas la loi. Comme cela a toujours été le cas pour faire passer la loi de Finances, le gouvernement brandit abusivement à chaque fois l'article 51 de la Constitution pour repousser les amendements de l'opposition. Ainsi, il ne nous reste que les questions orales et les questions écrites en plus des amendements de lois. Il faut que les règles du jeu démocratique soient établies et respectées par tout le monde et en premier lieu le gouvernement. Dans quel contexte évolue l'opposition au Maroc ? Ce qu'on remarque dans le contexte de l'opposition au Maroc c'est qu'il existe une vraie fuite en avant des ministres, ceux-là répondent souvent absents. Il arrive même qu'on ne trouve dans tout l'hémicycle qu'un seul ministre qui répond aux questions des députés à la place des autres ministres. C'est aussi le problème des députés de la majorité. Seulement 30% d'entre eux étaient présents pour voter la loi de Finances. Dans les commissions, il nous arrive parfois de rester seuls face aux ministres. On était par exemple 37 députés du PJD lors du vote de la loi de Finances. Parce que nos députés sont obligés d'être présents, ils ne peuvent pas s'absenter sans justification. Le gouvernement ne cherche pas à améliorer le débat. Il ne motive pas les députés à être présents. Car même si ceux-là l'étaient présents, leur rôle ne serait que de faire passer les projets du gouvernement sans les discuter, c'est pour cela qu'ils ne sentent pas l'utilité de leur présence au Parlement. Et cela produit un déchirement au sein même de la majorité. Le gouvernement doit assumer ses responsabilités pour élever le débat et dynamiser le Parlement. Qui incarne l'opposition au Maroc ? Je n'ai pas besoin de le dire, c'est le PJD. Au Maroc, il y a une opposition et un semblant d'opposition. Nous, nous ne sommes pas dans le sillage du gouvernement. Nous ne caressons pas le gouvernement dans le sens du poil. Il suffit de voir nos amendements. Notre approche est différente de celle des autres composantes de l'opposition qui travaillent, il faut le dire, chacune dans son espace. Le PJD s'oppose aux projets du gouvernement pas par simple principe de s'opposer, mais parce que nous proposons une réelle alternative à la majorité que ce soit au niveau de la fiscalité et de la politique économique et sociale, ou encore concernant la lutte contre la pauvreté. Chez nous, l'opposition c'est avant tout une pratique.