Le ministre chargé de l'Habitat et de l'Urbanisme, Taoufiq Hjira, a affirmé devant la Chambre des conseillers que son département a élaboré un projet de loi conférant à l'architecte le droit d'accorder des permis de construction sans avoir recours aux administrations concernées. Précisions du ministre. ALM : Vous avez affirmé devant le Parlement que votre département a élaboré un projet de loi conférant à l'architecte le droit d'accorder des permis de construire sans avoir recours aux administrations concernées? Qu'en est-il de cette mesure ? Taoufiq Hjira : Tout d'abord, il s'agit bien d'un projet de loi qui comme son nom l'indique, se trouve actuellement en phase préliminaire. Ce texte prévoit le remplacement de la procédure du permis de construire par une déclaration de l'architecte. En vertu de cette disposition, le citoyen n'aura plus besoin d'obtenir un permis de construire pour commencer les travaux de construction. Cette formalité sera remplacée par une déclaration que l'architecte établie en toute responsabilité, et par laquelle il déclare le chantier correspondant avec les dispositions du cahier de charges. Cette nouvelle procédure se place en fait comme un aboutissement cohérent de l'ensemble du processus administratif relatif à la construction actuellement en vigueur. Elle permet d'alléger ce processus, particulièrement contraignant et de simplifier les procédures administratives actuellement en place. Il permet également de donner la place de choix que doit occuper l'architecte dans son environnement. Elle permettra enfin de stimuler l'investissement. Concrètement, cette mesure concernera tous les logements dit R+3 et moins: il s'agit entre autres des villas, des habitats économiques, etc. Vous ne pensez pas que cette mesure confère aux architectes une prérogative qui relève de la compétence exclusive de l'Administration ? Non je ne le pense pas puisque l'Administration a déjà fait son travail. Il ne faut pas oublier que le permis de construire n'intervient qu'une fois l'Administration ait validé les deux phases procédurales prévues par la loi, à savoir le plan d'aménagement et le plan de lotissement. Sur ce plan, l'Administration assure parfaitement ses prérogatives et il ne s'agit à aucun moment d'abandon de compétences. Le problème qui se pose aujourd'hui réside dans le fait que les procédures administratives en matière de construction sont compliquées et prennent en général de 6 mois jusqu'à un an. C'est trop long et ça décourage beaucoup d'investisseurs. Et donc nous avons estimé que les deux phases de validation sont largement suffisantes en ce qui se concerne le contrôle a priori de l'Administration. L'impact que devra produire une telle refonte est considérable dans le sens où l'allégement des procédures et la mise en place de ce système de déclaration par l'architecte devra décourager fortement la prolifération de l'habitat insalubre. Il s'agit bien d'une révolution dans le domaine. Qu'en est-il de la concertation avec les autres départements ministériels, notamment avec le ministère de l'Intérieur ? Nous allons transmettre le projet aux différents départements concernés pour concertation et le projet va suivre le processus naturel par lequel passe tout projet de loi, depuis le secrétariat général du gouvernement jusqu'au Parlement. Naturellement, il n'est pas exclu que ce texte subisse entre temps des modifications aussi bien au niveau de la forme que dans le fond. À ce stade, le concept du projet a été validé par les collectivités locales ainsi que l'ordre national des architectes. Mais n'y a-t-il pas de risques de dérapages en confiant cette lourde responsabilité aux architectes ? Nous avons entièrement confiance en nos architectes. Cette mesure va certainement les responsabiliser davantage lors de l'exercice de leur mission. D'un autre côté, le fait de confier aux architectes le soin de déclarer et d'établir la conformité des chantiers aux dispositions des cahiers de charges, l'Etat va pouvoir mieux contrôler ce qui se fait réellement sur le terrain. Cette posture de l'Etat contrôleur a posteriori est d'ailleurs dans l'air du temps, à l'image de ce qui se fait dans d'autres administrations. Enfin, il va de soi que tout dérapage sera sanctionné. Ainsi, tout architecte qui ne respecte pas ses engagements en la matière se verra retirer l'attribution en question.