Aux nombreuses voix qui demandent la démission de Frédéric Mitterrand, Nicolas Sarkozy n'a pas répondu en personne. Il n'est pas besoin d'être un grand devin ou disposer d'une boule de cristal aux pouvoirs magiques pour affirmer que Frédéric Mitterrand, le ministre de la Culture de Nicolas Sarkozy ne goûtera pas pleinement au mœlleux et rougeâtre canapé que lui réserve Michel Drucker dans son émission «Vivement Dimanche» de ce 11 octobre. Même si l'animateur le plus gentil de la télévision française se livre aux contorsions les plus douloureuses, il ne pourra éviter au ministre de la Culture la torture de l'interrogation sur ses penchants pour «des jeunes garçons» avoués dans un livre publié chez Robert Laffont en 2005 intitulé «La mauvaise vie».Tout a commencé pour Frédéric Mitterrand comme un cauchemar, le jour où le cinéaste polonais Roman Polanski fut arrêté en Suisse à la demande de la justice américaine pour avoir drogué et violé une fille de 13 ans en 1977. Frédéric Mitterrand fut parmi les voix les plus fortes à avoir pris la défense de Roman Polanski. Ce qui choqua l'extrême droite et une partie de la droite traditionnelle. Après avoir violemment reproché au ministre de la Culture d'avoir pris la défense d'un repris de justice, si talentueux soit-il, l'extrême droite est allée exhumer le contenu d'un livre de Frédéric Mitterrand dans lequel il semble faire l'apologie de la pédophilie, avec cette confession de taille : «J'ai pris le pli de payer pour des garçons (…) La profusion de jeunes garçons très attrayants et immédiatement disponibles me met dans un état de désir que je n'ai plus besoin de réfréner ou d'occulter. L'argent et le sexe, je suis au cœur de mon système, celui qui fonctionne enfin car je sais qu'on ne me refusera pas». Il n'en fallait pas plus pour que l'affaire Polanski devienne l'affaire Mitterrand. Fait inattendu, non seulement l'extrême droite exige la démission, mais elle est rejointe dans son réquisitoire contre le ministre de la Culture par une partie de la gauche. Un de ceux qui se sont distingués dans cette chasse à l'homme fut le porte-parole Benoit Hamon qui ne trouve pas de mots assez durs pour stigmatiser le tourisme sexuel de Frédéric Mitterrand. Il trouve «injustifiable» et «inacceptable» l'exploitation sexuelle par «ceux qui ont de l'argent, qui savent que c'est illégal chez eux et profitent de l'existence de ces réseaux ailleurs pour aller assouvir des fantasmes». La première réaction de Frédéric Mitterrand se voulait une illustration du panache dont il a souvent fait preuve dans sa carrière: «Se faire traîner dans la boue par le Front national est un honneur». Mais il dut vite déchanter quand il remarque l'ampleur politique que prend cette affaire avec l'entrée de la gauche dans la danse : «C'est bien dommage de pouvoir imaginer que des élus de gauche aillent rejoindre le Front national». A ces nombreuses voix qui demandent la démission de Frédéric Mitterrand, Nicolas Sarkozy n'a pas répondu en personne. Il a laissé parler ses porte-parole comme le secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant, ou son conseiller spécial Henri Guaino, lequel, très mal inspiré cette fois, ne trouve que cet argument pour prendre la défense du ministre de la Culture : «Tout cela est plein d'excès, tout cela est assez indigne au fond (…) Je n'ai pas entendu Frédéric Mitterrand prendre position contre le combat de la France contre le tourisme sexuel». Cette défense automatique est relativisée par d'autres membres du gouvernement comme le ministre du Travail Xavier Darcos qui invite Frédéric Mitterrand à adopter une autre attitude que celle qu'il a observée jusqu'à présent : «On lui fait un reproche sur des comportements personnels, des comportements moraux, c'est à lui de répondre à cela. Je pense qu'il faut qu'il réponde autrement que simplement par l'indignation». La crispation autour de cette polémique laisse clairement apparaître un malaise persistant d'une grande partie de la droite qui n'a toujours pas admis le bien-fondé politique de la décision de Nicolas Sarkozy de faire entrer un « Mitterrand» dans son gouvernement comme le résume bien une autre déçue de la Sarkozie, Christine Boutin, ancien ministre du Logement «La nomination de Mitterrand a ébranlé la droite classique, mais ses postures et ses positions vont faire des ravages terribles dans l'électorat». Le genre de message auquel Nicolas Sarkozy n'est pas insensible.