Parce que son bilan allait être violemment interrogé au cours de cette campagne des européennes, Sarkozy n'a pas hésité à ressortir les vieilles ficelles qui lui avaient assuré une fortune et une ascension politique d'une grande régularité. à moins de deux semaines du scrutin européen, la stratégie de Nicolas Sarkozy pour affaiblir ses adversaires semble prendre forme. Elle est basée sur deux leviers essentiels: l'affirmation, à base de rumeurs et de ballons d'essai, de continuer à prospecter les terrains vagues de l'ouverture politique et la tentation de réanimer le spectre de l'insécurité en ayant recours à un arsenal juridique destiné à rassurer le chaland et à apaiser les chaumières. Cette recette magique semble avoir été conçue dans les cénacles de la majorité présidentielle sur la base d'une conviction indiscutable : l'opposition qu'elle soit de gauche emmenée par les socialistes ou de droite animée par François Bayrou et Dominique de Villepin, allait faire campagne sur la base d'un seul slogan , celui de demander une évaluation du bilan de la gouvernance de Nicolas Sarkozy, les enjeux strictement européens ayant été délaissés au rayon des sujets arides sans grande saveur électorale. Et parce que son bilan allait être violemment interrogé au cours de cette campagne des européennes, Nicolas Sarkozy n'a pas hésité à ressortir les vieilles ficelles qui lui avaient assuré une fortune et une ascension politique d'une grande régularité. Parmi ces recettes, l'insécurité figure comme le joker gagnant. En l'espace de quelques courtes semaines, le gouvernement semble saisi d'un brusque appétit de légiférer. La machine sécuritaire s'emballe. Mercredi matin, Michelle Alliot-Marie, ministre de l'Intérieur, présentait au Conseil des ministres sa loi d'orientation et de programmation qui recyclait opportunément de vieux articles. La loi touche des secteurs aussi divers de la sécurité intérieure que le terrorisme, la cybercriminalité, la délinquance routière, la réorganisation territoriale de la police. A l'activisme soudain de Michelle Alliot-Marie, il faudrait rajouter les propositions fulgurantes d'hommes politiques proches de Nicolas Sarkozy comme le député maire UMP de Nice Christian Estrosi et son projet de loi sur les «bandes violentes» ou encore Xavier Darcos et sa proposition de doter les collèges et lycées d'une force de sécurité spécifique et de portiques de sécurité pour empêcher les élèves d'y introduire des armes. L'autre arme de Nicolas Sarkozy pour affaiblir ses adversaires est la clef magique de l'ouverture qui avait permis à des personnalités comme Bernard Kouchner, Eric Besson , Fadela Amara, Martin Hirsch, de faire partie de l'exécutif. Tenté au début de son mandat par une telle stratégie pour se prémunir des accusations de sectarisme dont l'opposition l'avait affublé, Nicolas Sarkozy s'est vite rendu compte que cette «ouverture» suscitait de mortelles divisions au sein de l'équipe adverse. Plus efficace qu'une active cinquième colonne, la séduction et le retournement des symboles de l'opposition ont montré combien il était politiquement efficace de semer le doute et la zizanie dans la maison d'en face pour l'empêcher de se remettre debout et d'écrire un projet alternatif pour 2012. L'homme qui joue les leurres dans cette conjoncture est Claude Allègre. Après avoir été accueilli par un haut-le-cœur à gauche comme au gouvernement, Claude Allègre continue son numéro de charme qui ferait rougir le timide et hésitant Bernard Kouchner : «Je vais voter pour Michel Barnier, sans aucune hésitation, je n'ai pas d'état d'âme. D'abord j'aime bien Barnier, ensuite je pense que Sarkozy est la seule personne qui a fait bouger la Commission européenne et la présidence française de l'UE a été formidable». Mais le Parti socialiste que cette ouverture était destinée à déstabiliser, semble prendre ces gesticulation avec humour et légèreté. Martine Aubry la première secrétaire du PS se permet le luxe de mettre en garde Nicolas Sarkozy et ses amis : «Je leur souhaite bon courage, s'il rentre au gouvernement…. sur le réchauffement climatique, quand nous tous politiques nous sommes venus à dire que c'est un sujet majeur pour les générations qui viennent (...) si un ministre ose dire l'inverse de ce qui est une vérité absolue, je leur souhaite bon courage, car il ne va pas se taire, lui».