Toutes les raisons objectives étaient réunies cette année pour faire de ce premier Mai une grande journée politique de contestation. La crise terrasse de larges secteurs de l'économie française, le chômage fait de bonds vertigineux, les ouvriers en colère inventent la séquestration des patrons. L'image était attendue par les téléobjectifs comme l'évènement majeur de ce premier Mai. Celle de Martine Aubry, première secrétaire du Parti socialiste et en compagnie de Ségolène Royale, bras dessus, bras dessous, en train de battre le pavé parisien , en tête de cortège des manifestations du premier Mai. Ce couple devait être couvé d'un regard bienveillant et chaperonné par le maire de Paris Bertrand Delanoë. Cette image là, à travers laquelle les socialistes devaient montrer le premier grand signe d'unité depuis les violentes déchirures du congrés de Reims n'aura pas lieu. Ségolène Royal a décidé à la dernière minute de manifester à Niort aux côtés des ouvriers de l'équipementier automobile Heuliez. La justification annoncée par Ségolène Royal pour ne pas être à ce grand rendez-vous parisien n'est pas de nature à étancher la soif des curieux. Bien au contraire, elle relance avec plus d'acuité les intraitables divergences entre les deux premières dames socialistes. L'intérêt d'une entreprise locale, si vitale soit elle, ne peut avoir la priorité sur un parti qui prétend au premier rôle de l'opposition et dont l'unité, réelle ou apparente, est la clef de succès et de survie. Toutes les raisons objectives étaient réunies cette année pour faire de ce premier Mai une grande journée politique de contestation. La crise terrasse de larges secteurs de l'économie française, le chômage fait de bonds vertigineux, les ouvriers en colère inventent la séquestration des patrons comme méthode d'expression et de protestation. Les centrales syndicales semblent être dépassée par l'ampleur du désarroi qui saisit les patrons. Le gouvernement de Nicolas Sarkozy est sur la corde raide. Bref, un premier Mai qui aurait pu garantir une amplification maximale au discours de gauche qui se veut un alternatif à la gestion libérale de droite Tous ceux qui s'attendaient donc à ce que les socialistes profitent de cette date symbolique du premier Mai pour ranger leurs rancunes au placard et entamer la séquence des élections européennes dans l'unité pourront, selon leur approche, ou pousser un ouf de soulagement ou exprimer un soupir de colère. Le porte-parole du PS Benoit Hamon pourra toujours se consoler en affirmant à haute voix qu'il y aura «pleins d'autres» occasions «pour les images d'unité». Le coup semble rude pour une direction socialiste incapable de fixer une date pour un meeting commun entre Martine Aubry et Ségolène Royal. Dans sa communication, le PS annonce sans grande certitude la présence du duo à Rezé, près de la ville de Nantes, le 27 mai. Ceux qui peuvent se frotter les mains devant de telles dissonances socialistes sont par ordre d'opportunisme politique l'extrême gauche qu'anime Olivier Besancenot. Le célèbre facteur de Neuilly n'est jamais là où on l'attend. Dans un geste de radicalité supplémentaire, il a préféré aller défiler en Guadeloupe, aux côtés de son idole du moment Elie Domota, porte-parole du LKP (mouvement contre l'exploitation outrancière en créole). Olivier Besancenot est souvent accusé par le gotha socialiste de vouloir évincer le PS du monde de la contestation sociale et de faire main basse sur l'ensemble de son héritage ouvrier. Le second pôle qui doit se réjouir de la permanente «Fitna» socialiste est la majorité présidentielle avec son fer de lance l'UMP. A la veille d'un scrutin européen aux ambitions configuratrices, il est rassurant pour Nicolas Sarkozy de voir que malgré les généreuses incantations sur l'unité, son principal adversaire continue de souffrir de divisions internes paralysantes. Le fruit immédiat d'une absence de leader naturel autour duquel un consensus peut se faire et d'une multiplication des égos aux visées et aux intérêts éparpillés. En plus de la profondeur du malaise social que traduit l'inédite manifestation unitaire des syndicats, Nicolas Sarkozy pourra toujours retirer de ce premier Mai 2009 une seule et grande leçon politique : le feu couve toujours dans la maison socialiste. Ségolène est dans l'incapacité de s'entendre avec Martine. L'autoroute pour 2012 reste pavée des meilleures promesses.