Avec des ressources précieuses tels que les phosphates et un gouvernement engagé à stimuler les dépenses sur des projets d'infrastructure, le Royaume maintiendra probablement sa position d'opérateur régional. Au moment où les marchés d'exportation primaires du Maroc –les économies de la zone euro– commencent à se rétracter, le Royaume cherche d'autres sources de revenus, ce qui commence à porter ses fruits. Alors que les flux commerciaux sont en baisse et les envois de fonds des Marocains résidant à l'étranger (MRE) devraient diminuer en 2009, l'afflux d'investissement du Golfe et la résurgence du secteur agricole devraient stimuler le pays dans l'année à venir. Dans une récente déclaration, le ministre marocain de l'Economie et des Finances, Salaheddine Mezouar, a déclaré qu'en dépit d'une baisse dans certains secteurs, le gouvernement s'attend à une croissance du PIB comprise entre 5,8% et 6,7% en 2009, soit à peu près la même qu'en 2008 et une bonne performance, compte tenu de l'impact du ralentissement global sur d'autres économies régionales. La croissance robuste prévue compte sur un revirement dans le secteur agricole, l'un des plus grands contributeurs au PIB du Maroc. Les fortes pluies de ces derniers mois devraient donner une bonne récolte, qui sera particulièrement la bienvenue après les sécheresses de 2007. Le rendement commence à augmenter avec le début de la saison des pluies de 2008 et semble continuer de croître cette année. Avec des précipitations accumulées supérieures à 106% par rapport à ceux d'une année normale et les barrages présentant un taux de remplissage de 66,6%, en hausse de 46,3% sur une période en 2008, l'agriculture semble en passe de retrouver sa position à la fois de contributeur principal du PIB du pays et un créateur d'emplois. Le gouvernement prévoit que cela ajouterait 3,2% à la croissance du PIB en 2009, en hausse de 1,3% comparativement à 2008, et il cherche à implementer une nouvelle stratégie nationale visant à développer davantage la croissance. En janvier 2009, le gouvernement a confirmé que le Plan Maroc Vert, un programme visant à mettre à niveau la compétitivité de l'agriculture marocaine afin de l'intégrer dans les marchés mondiaux et d'accroître la valeur ajoutée, sera doté d'un budget de 20 milliards DH (1,8 milliard d'euros) pour les cinq prochaines années. Le plan rénovera ce secteur par le biais de l'augmentation des investissements, l'amélioration de la gestion et la formation, ainsi que la fourniture d'accès à l'eau et à la terre. Cette forte augmentation agricole contribuera à relâcher la pression sur certains secteurs primaires du Maroc. Le secteur industriel, un pilier traditionnel du pays, a été durement touché par la crise, avec des exportations en baisse à 32% dans les deux premiers mois de 2009; quant aux câbles électriques, les textiles et les composants électroniques à eux réunis, ils retombent à 25%. Toutefois, le phosphate, dont le Maroc est l'exportateur mondial numéro un avec plus de 50% des réserves mondiaux, a connu la plus grande contraction. Comme les prix ont augmenté sur le marché international, les exportations de phosphates et ses dérivés ont diminué de 59,5% au mois de février seulement. Le pays a exporté 447.400 tonnes de phosphates en février 2009, pour un produit brut de 707,9 millions DH (63,7 millions d'euros), comparativement à 1,97M de tonnes au cours de la même période en 2008. Malgré le ralentissement actuel, le Royaume reconnaît le potentiel du secteur et investira environ 4,5 milliards d'euros en phosphates d'ici 2012. Le ralentissement de la zone euro a non seulement eu des impacts sur les flux d'exportation du Maroc, mais aussi limité le flux d'argent provenant de Marocains résidant à l'étranger. Les envois de fonds sont devenus une source essentielle de devises et selon le Conseil déontologique des valeurs mobilières (CDVM), 58% des investisseurs étrangers dans la Bourse de Casablanca sont des expatriés marocains. Plus généralement, les transferts de fonds continuent à jouer leur rôle traditionnel pour compléter les revenus des familles des expatriés, et à renforcer les revenus en devises. Cette année, toutefois, il est peu probable que les MRE puissent envoyer de l'argent au même rythme. Plus de 80% des expatriés marocains sont basés dans l'UE, principalement en France et en Espagne. Au cours des dernières années, par exemple, l'essor du secteur de la construction espagnole a employé un grand nombre de MRE, mais avec les difficultés que connaît le secteur, les envois de fonds devraient baisser en 2009. Pourtant, en dépit de la baisse dans certains des marchés d'exportation, le déficit commercial du Maroc devrait rester stable en 2009, avec les faibles prix du pétrole qui réduisent considérablement les importations. Ces dernières ont diminué de 16% à 40,9 milliards Dh (3,6 milliards d'euros) dans les deux premiers mois de 2008, comme le prix du pétrole brut a baissé de 49,2%, la facture pétrolière du pays a été réduite de 54,9%. Compte tenu de l'absence du pétrole marocain et de sa forte dépendance à l'importation, l'assouplissement des prix offre un peu de répit. En outre, alors que la croissance robuste de l'IDE en 2008 sera difficile à maintenir en 2009, un certain nombre de projets annoncés au cours des derniers mois indiquent que les investisseurs étrangers, en particulier de la région du Golfe, attendent toujours des rendements sûrs au Maroc. La dernière semaine de mars a vu l'annonce de deux grands engagements d'infrastructure dans le Royaume. Le 30 mars, l'Abu Dhabi National Energy Company (TAQA) a dévoilé des plans d'investissement de 1,9 milliard d'euros dans trois centrales électriques dans la région du Maghreb au cours des quatre prochaines années. Bien que certains des fonds soient affectés à un projet en Tunisie, le Maroc reste le principal bénéficiaire de cet investissement. TAQA commencera les opérations au cours de l'année, avec une mise à niveau de la centrale électrique de Jorf Lasfar et la construction d'une centrale éolienne de 300 mégawatts à Tarfaya, en partenariat avec la compagnie espagnole Iberdrola Ingenieria Construccion. Les opérations commerciales devraient débuter en 2012 ou 2013. Après l'annonce de TAQA, Air Arabia, le plus grand transporteur low cost du Moyen-Orient, a dévoilé ses plans d'investissement de 37,8 millions d'euros pour la gestion de «Regional Airlines» et pour lancer son deuxième hub à Casablanca, à l'aéroport international Mohammed V. L'accord, signé en novembre 2007, donne à la compagnie émiratie le contrôle de la gestion de la compagnie aérienne marocaine, qui prendra le nom de «Air Maroc Arabie» et desservira la France, l'Italie, l'Espagne et le Royaume-Uni à partir du deuxième trimestre de 2009. Ces nouvelles connexions internationales soulignent la capacité du Maroc de se protéger de la crise au cours des prochains mois. Les possibilités d'investissement du Royaume sont réparties à travers un large éventail de secteurs et leurs diversités permettront de continuer à attirer l'attention de diverses sources. Bien que l'industrie ne soit pas prête de reprendre d'aussi tôt, en mettant en place actuellement des infrastructures, le Maroc sera prêt lorsque la demande provenant de la zone euro sera stable. Oxford Business Group 7 avril 2009