Mohamed Mustapha Ibrahimi, président de la commission de la justice, de la législation et des droits de l'Homme, explique la finalité et les grandes lignes de la loi sur la protection des données personnelles. ALM : Le Conseil de gouvernement vient d'adopter le décret d'application de la loi sur la protection des personnes physiques à l'égard des données à caractère personnel. Quelle est la finalité de cette nouvelle loi ? Mohamed Mustapha Ibrahimi : La nouvelle loi a pour finalité la protection de l'intimité de l'individu. Elle consolide notre législation afin qu'elle puisse garantir la défense des informations à caractère personnel. Elle réprime tout usage abusif des données personnelles. On ne peut rester en retrait, il fallait qu'il y ait une législation qui s'oppose à tout usage qui nuirait aux libertés individuelles. En France et depuis l'adoption de la loi informatique et libertés de 1978 jusqu'à sa dernière révision en 2008, plusieurs dispositions à caractère législatif et réglementaire ont été prises pour garantir la liberté des personnes. Dans ce même sens, l'UE a adopté plusieurs directives relatives à la protection des personnes physiques à l'égard des données à caractère personnel. Le Maroc a pu obtenir un Statut avancé au sein de l'UE. Ce Statut nous impose de prendre de nouvelles dispositions et de mettre à niveau notre législation. C'est dans ce sens que la Nouvelle loi a été adoptée. Le projet a été présenté par le ministre du Commerce, de l'Industrie et des nouvelles technologies. Compte tenu du caractère technique du projet, nous l'avons examiné dans le cadre de la commission de la justice, de la législation et des droits de l'Homme. Nous avons en plus organisé une journée d'étude à laquelle nous avons convié plusieurs juristes et spécialistes qui ont répondu aux interrogations des députés. Quel est le problème que pose le traitement des données personnelles ? La question est très délicate. L'informatisation des données à caractère personnel facilite l'accès à ces données. Certaines sociétés cherchent à obtenir des données à caractère personnel pour plusieurs raisons. Certaines cherchent à récupérer des données afin d'influencer le choix du consommateur alors que d'autres chercheront à obtenir des données aux fins d'un usage illégal et abusif ce qui est synonyme de violation de la vie privée. Les individus sont désormais animés par un sentiment d'insécurité. C'est dans ce cadre d'idées que la nouvelle loi requiert toute sa pertinence puisqu'elle est destinée à protéger les personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel. La loi prévoit la mise en place d'une commission de contrôle et de protection des données à caractère personnel, quel est le rôle de cette commission ? La commission de contrôle est instituée auprès du Premier ministre. Elle a pour mission de mettre en œuvre et assurer le respect des différents textes d'application relatifs à la nouvelle loi. Elle a aussi pour mission d'informer l'ensemble des personnes concernées de leurs droits et obligations. La commission doit également jouer le rôle de conseiller auprès du gouvernement pour tout ce qui concerne cette question. La commission peut avoir accès direct aux données objet de traitement de la part de tout organisme. Elle est investie d'un pouvoir d'investigation qui lui permet d'accéder directement aux locaux du traitement des données. Elle peut collecter et réunir tous les documents nécessaires à sa mission de contrôle. La commission peut ordonner qu'on lui remet tout document de toute nature qui lui permet d'examiner les plaintes qui lui seront soumises. Nous souhaitons dans l'avenir que cette commission soit plutôt indépendante à l'égard du pouvoir réglementaire. Quelles sont les sanctions prévues par cette loi à l'égard des contrevenants ? La loi prévoit des peines pécuniaires ainsi que des peines privatives de liberté à l'égard des contrevenants. Les peines d'emprisonnement peuvent aller d'un mois à deux ans. Dans le cadre des compétences de la commission de contrôle, cette commission peut procéder à des sanctions à l'égard des entreprises ou sociétés auteur d'un abus. Elle peut notamment ordonner le retrait, l'interdiction temporaire ou permanente des données. Les sanctions peuvent aller jusqu'à l'interdiction totale des activités de la société contrevenante.