L'affaire d'abus de confiance de Julien Dray, un proche notoire de Ségolène Royal, provoque une gêne manifeste au Parti socialiste. A peine sorti des affrontements meurtriers du congrès de Reims qui a vu Martine Aubry arracher d'un poil le premier secrétariat à Ségolène Royal que le Parti socialiste se voit affronter une sourde crise. Un des ses grands symboles, Julien Dray est littéralement pris dans les filets d'une affaire d'abus de confiance depuis que le 10 décembre, le parquet, sur les recommandation de la cellule anti-blanchiment du ministère des Finances (Traficin), a ouvert une enquête sur des mouvements de fonds sur les compte de l'association Les parrains de SOS racisme et l'organisation lycéenne FIDL depuis janvier 2006. Le domicile et le bureau de Julien Dray à l'Assemblée nationale ont été perquisitionnés pour bien signifier la gravité de la démarche. Si cette affaire continue de provoquer les gros titres dans la presse, elle est accueillie par la classe politique, notamment socialiste, par un silence de mort. Pas de commentaire public, pas de déclaration fracassante, ni pour prendre la défense ni pour enfoncer. Un des rares socialistes à s'être aventuré sur ce terrain est Malek Boutih, membre du bureau politique du PS qui, avec Harlem Désir et Delphine Batho, ont été parmi les jeunes talents découverts et promus par Julien Dray. Malek Boutih, actuellement sous les lumières pour avoir refusé la propositions de Nicolas Sarkozy d'entrer au gouvernement pour y défendre la diversité, prend sa défense : «Il est déclaré coupable avant même la fin de l'instruction qui, à mon avis, va durer longtemps (…) Quand bien même cette affaire sera finie d'un point de vue judiciaire, il a été exécuté médiatiquement et je pense qu'il aura du mal à s'en relever». Malek Boutih déconseille à son ami Julien Dray de démissionner : «s'il démissionne, c'est comme s'il se déclarait coupable». L'intéressé, lui-même, n'envisage nullement cette hypothèse. S'il prévoit de se mettre un peu en retrait et de ne pas siéger provisoirement au bureau national, il exclut d'abandonner ses fonctions et de démissionner comme l'entourage de l'actuelle direction du PS lui suggérait. Julien Dray a senti le déficit de soutien de Martine Aubry à son égard et a tenu à le faire savoi: «Le PS a été exemplaire tous courants confondus, mis à part quelques noms…le devoir d'un premier secrétaire dans ces moments là, c'est au moins d'essayer de prendre contact». Une des premières et rares voix officielles à commenter cette affaire fut le porte-parole du gouvernement Luc Chatel, pour qui la levée d'immunité parlementaire de Julien Dray n'est «pas d'actualité» avant de rajouter une phrase qui veut dire tout et son contraire : «Ce n'est pas mon genre d'aller viser quelqu'un qui est en difficulté». Ce n'est pas la première fois que Julien Dray se frotte au monde de la justice. Déjà en 1999, il fut au centre d'une enquête préliminaire d'une affaire d'achat d'une montre réglée en partie en liquide d'une valeur de 38.000 euros. Commentant cette affaire qui peut épaissir le faisceaux de suspicions à son égard, Julien Dray qui traîne une réputation de joueur de poker, argumente: «Je suis un acheteur compulsif, ça veut dire que j'achète et je revends pour acheter». L'affaire de Julien Dray, un proche notoire de Ségolène Royal, provoque une gêne manifeste au Parti socialiste. Un des membres de la direction actuelle, Bruno Julliard, ex-président du syndicat étudiant UNEF, actuel secrétaire national à l'éducation tente de minimiser son impact : «La question n'est pas de soutenir ou de ne pas soutenir, c'est une affaire qui ne concerne pas le Parti socialiste, c'est une affaire privée qui concerne Julien Dray». Un autre baron des socialistes propose une autre lecture à effets politiques. Le député Pierre Moscovici estime «qu' il ne faut pas lyncher Julien Dray par avance et dénonce «le déferlement médiatique dans cette affaire» et «sa simultanéité» avec le mouvement contre la réforme des lycées.Justifiant le silence de Martine Aubry, le député de Paris Jean-Christophe Cambadélis a une explication : «Depuis 1982-83, les premiers secrétaires ont décidé de ne pas intervenir dans ce type d'affaires (…) Je crois qu'ils ont raison, qu'il ne faut pas politiser les choses».