Après 6 ans et demi au sein du Réseau Maillage, Ahmed Ghayet a quitté l'association, il y a un mois et demi. Il explique les raisons de son départ, son parcours et ses projets à venir. ALM : Quand est-ce que vous avez décidé de quitter le Réseau Maillage ? Ahmed Ghayet : Il y a plus d'une année, j'avais prévenu les différentes associations du Réseau Maillage que je souhaitais passer le relais. Mais les membres du Réseau m'avaient demandé de ne pas quitter l'association et j'ai alors cédé. J'ai assuré la présidence de Maillage, une année supplémentaire. Cela m'a permis de mener à bien l'opération concernant le centre d'estivage de Tamaris où nous avons reçu plus de 3500 jeunes de 15 à 25 ans issus des quartiers défavorisés de Casablanca.C'est à la fin du mois de septembre 2008 que j'ai annoncé officiellement que je quittais le Réseau Maillage. J'avais le sentiment que ma mission avait été accomplie. Quelles sont les raisons de votre départ ? Après 6 ans et demi au sein de l'association, j'estime avoir fait ma part de travail. Il y a un moment dans la vie où il faut prendre des décisions et passer le flambeau. Rester au sein de la même structure n'est pas bon pour soi-même. «Maintenant c'est aux jeunes du Réseau Maillage de s'organiser. Ils ont atteint une maturité qui leur permettra de prendre des décisions sans moi. Ces jeunes sont devenus de véritables interlocuteurs, acteurs, décideurs et formateurs. Je leur fais entièrement confiance. Ils sauront peut-être développer encore mieux le Réseau. Cela fait plus de 6 ans que vous assurez la présidence de cette association. Quel bilan-dressez-vous ? Quand on a débuté en avril 2002, on ne parlait pas beaucoup de la jeunesse. Le milieu associatif était assez restreint. Il y avait beaucoup d'adultes et très peu de jeunes militants à la tête d'associations. Les actions associatives, sociales de proximité n'avaient pas encore vraiment vu le jour. Par contre, de nos jours, tout le monde s'est saisi de la problématique de la jeunesse, des quartiers défavorisés. Nous sommes arrivés à créer un Réseau qui compte une quarantaine d'associations entre Casablanca, Rabat, Salé, Mohammédia, Laâyoune, Fès, Béni Mellal… alors qu'au début nous avions commencé l'aventure avec une seule association à Ben Abid, près de Casablanca. Nous avons aussi été les premiers à introduire la notion de travail en réseau. Avec des associations indépendantes ? Nous avons toujours tenu à ce que chaque association qui compose Maillage soit autonome (avec son propre bureau, son financement, ses activités). Nous avons créée des locaux associatif à Akrach, Salé, Casablanca ( place Mohammed V) ainsi que des terrains de sport dans différents quartiers. Le Réseau Maillage a aussi été à l'initiative de «Touche pas à mon pays» après les attentats du 16 mai. Nous avons mis en place le «Grand oral de la jeunesse» mais aussi «Fais entendre ta voix» lors des élections. Les jeunes étaient amenés à interpeller les candidats et les élus. A ceci, s'ajoute le centre d'estivage de Tamaris qui existe maintenant depuis quatre ans sans compter la fête de la musique qui est célébrée chaque année le 21 juin. A côté de ces différentes manifestations, il y a aussi tout le volet formation. Il est vrai que durant les années précédentes, les actions de Maillage étaient davantage centrées sur le sport, la culture et la musique. Vous êtes sorti quand même de ce créneau ? Il y a eu un tournant. On s'est intéressé davantage à l'emploi et la formation des jeunes. Beaucoup de jeunes ont pu suivre par exemple une formation en tant qu'animateur de colonie de vacances. Il ne faut pas non plus oublier que le Réseau Maillage a été le premier à créer un partenariat avec l'ONG Search For Common Ground. Ce partenariat a permis de former des jeunes médiateurs de quartiers. Certains d'entre eux ont eu la chance de travailler au sein de cette ONG. L'action associative a ainsi contribué à l'insertion socioéconomique des jeunes. Avez-vous des projets à venir ? J'ai commencé mon engagement associatif en décembre 1983. J'ai été l'un des initiateurs de «la marche des Beurs» de Marseille à Paris pour l'égalité des droits et contre le racisme. Si j'ai passé le flambeau du Réseau Maillage, c'est parce que je vais prendre un autre. J'ai effectivement des projets. J'ai commencé à écrire un ouvrage qui s'intitule «De l'autre côté du soleil». C'est une expression que les jeunes emploient beaucoup lorsqu'ils parlent de leur quartier «Mor chems». Cet ouvrage retrace les expériences que j'ai vécues dans le Maroc des quartiers, des bidonvilles et autour de la jeunesse. Les jeunes du Réseau Maillage m'ont beaucoup donné que ce soit en termes d'amitié, de confiance et de fraternité. Je voulais partager ces choses avec un grand nombre de personnes.