L'Algérie doit indemniser les victimes sahraouies de la torture perpétrée dans les camps de Tindouf, affirme Ramdane Ould Messaoud, président de l'Association sahraouie des droits de l'Homme (Assadeh), à l'origine de la plainte pour génocide. ALM : La justice espagnole vient de déclarer recevables les résultats de l'expertise médicale effectuée sur d'anciennes victimes sahraouies du Polisario. Pourriez-vous nous édifier sur ces résultats ? Ramdane Ould Messaoud : L'expertise, effectuée par deux médecins marocains universellement reconnus, en l'occurrence le professeur Issam Béni Aych, responsable de l'Institut de médecine légale de Casablanca, et le docteur Amal Bouimejane, du même Institut, confirme que les anciennes victimes sahraouies du Polisario ont bel et bien subi des sévices physiques et portent encore les séquelles psychologiques héritées de leur détention dans les bagnes du Polisario. Parmi ces victimes, qui sont au nombre de 28 personnes, figurent Hussein Beïda, membre du Conseil royal consultatif pour les affaires sahariennes (Corcas), et Dahi Aguay, président de l'Association des portés disparus au Polisario (APDP). Les résultats de cette expertise, auxquels les médecins ont joint des photos montrant clairement les parties corporelles touchées, nous les avons envoyés à la justice espagnole en date du 17 juin dernier. Mercredi dernier, nous avons reçu une lettre de la part du tribunal d'instruction N°5, relevant de l'Audience nationale, dans laquelle il affirme accepter les résultats de l'expertise. Quel impact peut avoir ce développement sur le cours de la plainte déposée par votre association contre les tortionnaires du Polisario ? Comme vous le savez, nous avons déposé fin 2007 une plainte pour génocide contre des dirigeants du Polisario et contre de hauts gradés de l'armée algérienne. Notre initiative a suscité de grosses craintes parmi les dirigeants du Polisario, notamment chez les représentants du front en Espagne. Je rappelle que, suite à notre plainte, la direction du même front a convoqué son représentant à Madrid, Brahim Ghali, pour le nommer soi-disant ambassadeur à Alger. Idem pour d'autres représentants du front en Italie, et dans d'autres pays européens, qui ont dû troquer leur séjour européen doré pour des postes moins confortables en Algérie, en Angola et au Nigeria. La crainte de poursuites judiciaires est telle que les victimes de la torture ont la nationalité espagnole, ou sont en droit de l'avoir. Maintenant, après l'acceptation des résultats de l'expertise médicale par la justice espagnole, nous sommes sûrs de l'aboutissement de notre revendication. Que voulez-vous finalement obtenir par cette plainte ? Nous voulons, d'abord, que les responsables des tortures, algériens et polisariens, comparaissent devant la justice pour répondre de leurs actes. Nous voulons, également, que l'Algérie, où les pratiques infâmantes de la torture ont eu lieu, indemnise les victimes de ces pratiques, et leurs familles. Je précise que l'Algérie est signataire de la Convention de Genève, elle ne peut donc se dérober à sa responsabilité dans la violation des principes humanitaires qu'elle a ratifiés. Etes-vous optimistes quant à l'issue de votre plainte ? En dépit des manœuvres orchestrées par des associations européennes sympathisant avec le Polisario, qui sont intervenues même auprès de nos avocats pour les amener à renoncer, nous continuons à œuvrer avec toute l'énergie de l'espoir et avec la même détermination pour obtenir justice pour les victimes. Nous sommes prêts à aller jusqu'au bout du procès, et nous faisons confiance à la justice espagnole.