Tel est le dilemme qui doit se poser à toute personne diffamée de façon anonyme. Répondre ou se taire? Se taire c'est prendre le risque que cela passe pour de la faiblesse ou de la crainte; répondre c'est prendre celui de descendre au niveau de celui qui insulte... c'est-à-dire le caniveau ! Je ne pense pas avoir jamais utilisé cette chronique à des fins personnelles ; permettez-moi cette fois-ci de le faire! Je ne vous ferai pas l'injure de vous mener jusqu'au caniveau dans lequel on veut me traîner, mais j'ai choisi aujourd'hui d'écrire ce que j'ai sur le cœur. Pourquoi demander à quelqu'un d'autre de le faire puisque j'ai mon stylo, mon papier, cet espace médiatique et surtout ma conscience. A plusieurs reprises, ces derniers mois, des SMS injurieux à mon égard et bien sûr anonymes ont été envoyés aux jeunes avec lesquels je milite au sein du mouvement associatif —j'ai fait face, heureux des marques de confiance que les jeunes m'envoyaient en retour— Peut-être ai-je eu tort puisque depuis quelques jours des jeunes de Rabat, puis de Casa, mais aussi de Béni Mellal et Meknès ont reçu un nouveau message... ainsi que des amis, des proches, des connaissances. L'objectif de cette manipulation est clair... Spontanément tous ceux-ci m'ont appelé, envoyé des textes de soutien, proposé de réagir : mais à nouveau, je me disais que cela n'en valait pas la peine, que ceux qui me connaissaient n'en croiraient pas un mot et que rien n'empêcherait ceux qui voulaient croire ces horreurs d'y prêter foi. Et puis non, j'ai décidé de réagir, pour moi tout d'abord, et puis aussi parce que je sais que ce phénomène de diffamation anonyme touche bien d'autres personnes et qu'à un moment ou à un autre il faut bien «ruer dans les brancards». Je suis sûr que vous vous demandez ce que peuvent bien contenir ces foutus messages, et bien allons-y : on m'y traite tout d'abord de «voleur» je sais ce n'est pas très original - ensuite de «profiteur de la jeunesse», arguant que je me ferais une réputation sur le dos des jeunes issus des quartiers ; que j'utiliserais leur détresse, leurs maux à des fins personnelles, que je gagnerais en notoriété et en espèces sonnantes et trébuchantes à leur détriment. A tout cela, j'opposerai que je suis militant associatif depuis l'âge de 20 ans, que j'ai une histoire, un vécu qui parlent pour moi au sein de la communauté immigrée, au cœur du gouvernement français auprès de ministres réputé(e)s. Oh bien sûr, je n'ai pas tout réussi et il y a bien des choses que je ne referais pas à l'identique si je le pouvais... mais je n'ai pas à rougir de mon parcours - Particulièrement d'avoir été l'un des protagonistes de «la Marche des beurs» contre le racisme en 1983, qui allait ouvrir pour les immigrés et leurs familles - au droit à la carte de séjour de 10 ans... ou encore d'avoir reçu un Ouissam de feu Sa Majesté Hassan II, pour mes actions. Depuis 5 ans, car je suis rentré au pays, volontairement, j'œuvre, avec mon expérience, auprès de la jeunesse des quartiers populaires, au sein du réseau Maillage afin que nos jeunes prennent leur destin en mains. Certes, notre action est modeste mais elle est faite de volonté, de courage, d'honnêteté, de conviction.., et tous ces jeunes n'en manquent pas. Toujours est-il que nous ne sommes pas restés les bras croisés, que nous avons bougé et tenté de «faire bouger» et que nous continuons. Qu'en cela, nous -et plus particulièrement moi-même, je me suis fait des ennemis, et suscité des jalousies, des rancunes, des mécontentements, que j'ai pu décevoir certains, déranger d'autres... cela me semble évident. N'est-ce pas inhérent à tout engagement, toute action publique? Cela autorise-t-il pour autant la diffamation ordurière? Certes non, car au cœur de ces messages, «on» glisse que je serais un «débauché» (je n'emploierai, ici, pas leurs mots) car c'est là qu'intervient l'abject : sachant très bien que je travaille majoritairement avec des jeunes entre 20 et 25 ans, l'insinuation est pernicieuse.., et répugnante. L'ignominie n'a donc pas de limites, car au-delà de ma personne, ce sont ces jeunes que l'on prend soit pour des naïfs, soit pour des «gigolos»... que c'est mal connaître. Alors bien sûr, «diffamez, diffamez, il en restera toujours quelque chose», et face à la rumeur, nous sommes souvent désarmés. Pourtant, ce sont les réactions, les témoignages, les messages de ces jeunes qui m'ont réconforté et donné la force de réagir. Voilà... c'est fait ! je n'ai l'ambition de passer ni pour un martyr, ni pour un saint, tout simplement pour un militant qui croit en ce qu'il fait; qui aime son pays, son Roi, ses compatriotes, les jeunes de cette nation. Dieu merci, j'ai en moi des valeurs qui ne me permettent pas ce déshonneur d'avoir ne serait-ce que l'idée de profiter d'eux financièrement, moralement... ou encore plus sordidement... Aurai-je dû me taire, certains le penseront peut-être, toujours est-il que j'ai écrit en conscience. Les gens de bonne foi me comprendront.