A quelques de jours de la Conférence d'Annapolis les ministres israéliens Avigdor Lieberman et Elie Ychaï conditionnent la signature d'un accord avec les Palestiniens à la reconnaissance par ceux-ci du «caractère juif de l'Etat d'Israël». C'est le 27 novembre prochain que se tiendra à Annapolis, dans le Maryland, la Conférence de paix sur le Proche-Orient dont George Bush avait annoncé la tenue dans une allocution prononcée le 16 juillet dernier. Le chef de l'Exécutif américain met pour l'heure la dernière main à son allocution devant les participants à cette Conférence. Elle est très attendue et reprendra, en les amplifiant, les thèmes développés dans son discours de 2003 où il se ralliait à la thèse de «la solution de deux Etats». Même si les Etats-Unis ont revu à la baisse leurs ambitions, ils se félicitent de la tenue d'un Sommet auquel doivent participer, outre Israéliens et Palestiniens, le Quartet international ( ONU, USA, Russie et Union européenne) ainsi que des représentants des pays modérés de la Ligue Arabe, voire ceux du Pakistan, de l'Indonésie et de la Malaisie, et, peut-être même, à la demande instante de Moscou, la Syrie. Que cette Conférence ait lieu, sept ans après l'échec du sommet de Camp David et le déclenchement de la Seconde Intifada, est en soi un succès. Elle marque la reprise du processus de paix et l'amorce de discussions sérieuses et constructives entre Palestiniens et Israéliens afin de parvenir à l'entrée en application de la Feuille de route et, donc, la création d'un Etat palestinien doté de tous les attributs de la souveraineté. Pour l'instant, l'on peut déplorer que le Premier ministre Ehoud Olmert et le Président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas ne soient pas parvenus à se mettre d'accord sur le texte d'une Déclaration conjointe. Il faut aussi se féliciter de leur décision de se rendre malgré tout à Annapolis et de poursuivre leurs efforts pour parvenir à une solution définitive du conflit israélo-palestinien. Des manœuvres de dernière minute sont montées par les extrémistes des deux bords pour empêcher une participation au sommet. C'est ainsi que deux partis de l'actuelle coalition gouvernementale israélienne, le Shass d'Elie Yichaï, une formation ultra-orthodoxe, et Israël Beïtenou d'Avigdor Lieberman, ont menacé de quitter le gouvernement en conditionnant la signature de tout accord avec les Palestiniens à leur reconnaissance du «caractère juif de l'Etat d'Israël». Cette exigence est formulée à la dernière minute par deux partis appartenant à la droite nationaliste. Elle n'est rien d'autre, selon l'analyste du quotidien Haaretz Yossi Verter, qu'une «tentative délibérée d'assassinat de la Conférence d'Annapolis» par deux dirigeants qui n'ont pu, par crainte des réactions de l'opinion publique, en empêcher la tenue. La position de Avigdor Lieberman et de Elie Ychaï a suscité une vigoureuse réaction du Comité de suivi des Arabes israéliens, une instance réunissant les dirigeants des principales associations représentatives de cette minorité. Chrétiens et Musulmans arabo-israéliens ont demandé au Président de l'Autorité palestienne de refuser d'apposer sa signature sur tout document qui ferait référence au « caractère juif de l'Etat d'Israël ». A leurs yeux, une telle mention mettrait, peut-être, en danger la minorité arabe israélienne qui veut «vivre dans un Etat qui est l'Etat de tous ses citoyens». Il est à souhaiter que l'ensemble des participants à ce Sommet auront la sagesse de considérer que l'enjeu de cette rencontre n'est pas la définition des caractéristique de tel ou tel d'entre eux, mais la solution du conflit israélo-palestinien. Une solution qui passe par la création d'un Etat palestinien, peuplé d'Arabes chrétiens ou musulmans et d'Arminiens, aux côtés d'un Etat d'Israël majoritairement peuplé aujourd'hui de Juifs vivant, semble-t-il, en harmonie avec leurs concitoyens chrétiens, musulmans, druzes, bédouins et circassiens. Il n'y a nulle nécessité de mentionner le «caractère juif de l'Etat d'Israël». Il s'agirait là du rappel, nullement novateur et donc inutile, de dispositions figurant dans la résolution 130 du Conseil de sécurité de l'ONU, une résolution acceptée par toutes les parties en présence, et dont on voit mal pourquoi elle devrait faire l'objet d'une nouvelle négociation. C'est, dit-on, le point de vue qu'entend rappeler avec fermeté et faire triompher le Département d'Etat américain, préoccupé désormais par l'après Annapolis et le début effectif des négociations entre Israéliens et Palestiniens.