Nicolas Sarkozy et les leaders syndicaux sont loin de trouver une issue au bras de fer sur le devenir des régimes spéciaux de retraites. François Fillon prête main-forte à Sarkozy. L'épreuve sociale qu'affronte Nicolas Sarkozy à partir de ce mardi soir est de celle qui, logiquement, fait trembler les politiques les plus forts et les exécutifs les mieux bâtis. Tant est palpable la violence de la détermination des organisations syndicales qui peut engendrer les crispations les plus dures. Pourtant Nicolas Sarkozy semble avoir donné un mot d'ordre à son gouvernement. Il faut tenir la dragée haute aux syndicats comme si l'ensemble du quinquennat dépendait de l'issue de ce bras de fer entre Nicolas Sarkozy et les leaders syndicaux sur le devenir très contesté des régimes spéciaux de retraite. François Fillon, le Premier ministre qui gémissait dans les couloirs de la radio Europe 1 que le président lui interdisait de se déployer sur les terrain des multiples crises sociale qui bourgeonnent dans différents secteurs, a été celui qui a formulé avec la plus grande force la détermination du gouvernement à ne pas céder : «Notre fermeté, ce n'est pas une posture, c'est une exigence de justice et d'équité (…) Personne ne pouvait imaginer que la réforme des régimes spéciaux se ferait facilement». Et sous couvert de tempérer la gravité de la crise, le ministre du Travail, Xavier Bertrand, souligne l'importance des enjeux engagés : «Le gouvernement ne souhaite ni la grève ni l'enlisement » . Tout en se disant prêt à recevoir Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT, il précise, impérial : «Mais si c'est pour me redire qu'il ne souhaite pas le passage à 40 ans de cotisations, c'est inutile». Alors que la presse française annonçait déjà à coup de titres hitchcockiens un novembre noir pour célébrer les six mois de la présidence de Nicolas Sarkozy, l'opposition a repéré le filon qu'il y avait à tirer à boulets rouges sur l'Elysée. Ségolène Royal qui avait totalement disparu de la scène médiatique se rappelle au bon souvenir du président de la république : «Nicolas Sarkozy a dégradé le climat social. Un piège est tendu aux organisations syndicales et aux salariés : il va prendre les Français à témoin en disant : vous voyez je vais aller jusqu'au bout, je vais faire la confrontation dans l'intérêt du pays (…) Non, c'est lui qui a dégradé le climat social parce que les premières décisions qu'il a prises sont celles qui ont avantagé les hauts revenus». Un des proches de Ségolène Royal, Julien Dray, propose, pour éviter la grève, une solution aux allures culinaires «Il (Sarkozy) est capable de manger avec tout le monde, pourquoi ne mange-t-il pas avec les organisations syndicales, pourquoi ne discute-t-il pas avec elles ?» Nicolas Sarkozy affronte donc sa première grande épreuve sociale avec un pari risqué. Celui de voir le pays paralysé sans autre perspective que de battre en retraite ou de passer en force. Le nez constamment plongé dans les sondages, le président de la République est convaincu que l'opinion saura comprendre et soutenir les réformes promises lors de la campagne présidentielle. Pour le président de la République, il s'agit d'un test majeur. L'homme de rupture est confronté à son heure de vérité. La grogne sociale a été lancée par les cheminots qui tiennent à leurs régimes spéciaux de retraite. Une fois relayée par les étudiants qui contestent la loi sur l'autonomie de l'université portée par la ministre Valérie Pecresse, les magistrats et les avocats qui s'opposent sourdement à la réforme de la carte judiciaire défendue par Rachida Dati, les marins-pêcheurs victimes directes de la hausse des prix du carburant et les organisations syndicales de fonctionnaires qui dénoncent la chute irréversible de leur pouvoir d'achat. De nombreux observateurs estiment que si Nicolas Sarkozy ne parvient pas à éviter la jonction ou « la coagulation » de ces multiples contestations, il n'aura d'autres choix que de renoncer à son projet de réforme. La crise sociale d'aujourd'hui a de fortes de chances de se transformer en crise politique. Sa volonté d'aller au bout de l'épreuve de force indique sa détermination. Nicolas Sarkozy scrutera avec attention les courbes de mobilisations de ces grèves. De leur ampleur dépendra certainement sa disponibilité à céder. Tout en ordonnant à ses troupes de se préparer à une bataille de longue haleine , Nicolas Sarkozy avait fait ce constat : «Ce n'est pas le mois de novembre qui sera difficile, c'est tout le quinquennat qui sera difficile. Car les réformes, je les ferai».