La décision du juge français a pris de court les membres de la délégation accompagnant Sarkozy lors de sa première visite d'Etat au Maroc. Le juge français chargé de l'instruction de l'affaire de la disparition de Mehdi Ben Barka, Patrick Ramaël, a délivré cinq mandats d'arrêt contre des personnalités marocaines dont un responsable toujours en fonction, un ancien patron des renseignements militaires, des individus cités par des pseudos, étant donné que leur véritable identité n'a jamais été révélée ainsi que des personnes aujourd'hui disparues. Ces mandats d'arrêt ont été délivrés par le juge la veille de la visite du président français au Maroc. Une coïncidence qui n'est pas passée inaperçue. «Le timing de la décision et de sa révélation aux médias n'est pas fortuit», estime un responsable marocain sous le couvert de l'anonymat. Interrogé sur l'éventualité de l'existence d'une volonté d'envenimer le climat de cordialité qui entoure la visite du chef de l'Etat français au Maroc, la même source a écarté cette possibilité. «Il s'agit plutôt d'une nouvelle tentative de la part de M. Ramaël d'attirer l'attention des médias, sinon quelle explication donner au timing qu'il a choisi ?», a-t-il dit avant d'ajouter: «ce n'est pas la première fois que le comportement de M. Ramaël suscite des interrogations sur ses motivations». Côté français, l'annonce de la décision du juge Patrick Ramaël a pris de court la délégation officielle accompagnant le président Sarkozy. Interrogé, hier, par les journalistes, le chef de l'Etat français s'est contenté de rappeler que «la justice française est indépendante». C'est l'unique déclaration sur la question qui a été faite à la presse. Jusqu'à mardi matin, l'entourage du président ainsi que les collaborateurs de la ministre de la Justice, Rachida Dati, ont refusé tout commentaire. Il est à signaler qu'il ne s'agit pas de la première fois que le juge français est au centre d'une polémique. En novembre 2005, le juge Ramaël avait suscité l'étonnement de ses confrères tant marocains que français en se comportant lors d'une visite de travail au Maroc d'une manière jugée bizarre par les responsables marocains notamment en faisant de fausses déclarations sur son identité et le lieu de son séjour aux services compétents à son arrivée à l'aéroport alors qu'il était venu juste pour exécuter une commission rogatoire dont il avait reçu l'aval de la part des autorités judiciaires marocaines. Rappelons que la volonté des responsables marocains de faire la lumière sur cette affaire vieille de 42 ans s'est traduite par la décision de mettre le dossier entre les mains du Conseil consultatif des droits de l'Homme (CCDH) et de l'instance équité et réconciliation (IER). Feu Driss Benzekri, alors président du CCDH et de l'IER avait déclaré en 2006 que le dossier suivait son cours normal mais qu'il existait beaucoup de difficultés à faire la lumière sur ce qui s'était passé en octobre 1965 à Paris vu la complexité de l'affaire.