Le président Nicolas Sarkozy affronte la première grande crise de son mandat suite à l'inclusion du recours au test ADN dans l'actuelle loi sur l'immigration présentée par Brice Hortefeux, ministre de l'Immigration et de l'Identité nationale. Pour dénoncer le recours au test ADN dans l'actuelle loi sur l'immigration défendue par Brice Hortefeux, ministre de l'Immigration et de l'Identité nationale, il est une réalité politique impossible à nier. Le président Nicolas Sarkozy affronte la première grande crise de son mandat. Par le mot «crise», il ne faut pas comprendre uniquement un pays paralysé par des grèves à répétition, ou un front social bouillant et instable. La crise dans ce contexte touche davantage l'interrogation du leadership et des choix moraux qui dictent ses décisions. Dans ce cas précis, la vague des protestations monte. Le champ de refus s'élargit. Première alerte sérieuse pour le gouvernement, le débat passionné et les interventions enflammées qui ont marqué l'examen que le Sénat a réservé à cette loi. Le nombre record de 16 orateurs était inscrit pour la discussion générale. Une grande surprise pour une institution ayant acquis, à force de discrétion et d'anonymat, la réputation d'une simple chambre d'enregistrement. Débats qui se sont terminés par le rejet par 200 voix contre 125. Le tout saupoudré par des prises de position au vitriol comme celle formulée par la sénateur de la Seine-Saint Denis, Eliane Assassi : «Eu égard au contexte économique du pays (...) il fallait bien, en cette rentrée parlementaire, détourner l'attention des Français et leur désigner, sinon un responsable, au moins un ennemi potentiel, de préférence étranger et originaire du continent africain». La seconde alerte à ne pas négliger est la diffusion d'une pétition intitulée «Touche pas à mon ADN», animée par deux professionnels de l'agitation politique et de la contestation républicaine, l'hebdomadaire satirique français «Charlie Hebdo» et l'association anti-raciste «SOS-Racisme». Le texte signé par des personnalités aussi diverses que variées comme Dominique de Villepin, Ségolène Royal, François Hollande, Bernard Thibault, patron de la CGT, et François Bayrou ou encore Raymond Aubrac. Ce texte initié par Dominique Sopo de SOS Racisme, Philippe Val de «Charlie hebdo» et de Bernard Henry Levy, jette les premières fondations d'une sorte de front républicain contre le recours au test ADN. Il lance un appel au président de la République et au gouvernement Fillon pour «retirer cette disposition, sous peine de contribuer, en introduisant l'idée que l'on pourrait apporter une réponse biologique à une question politique, à briser durablement les conditions d'un débat démocratique, serein et constructif sur les questions liées à l'immigration». La troisième alerte est à trouver à deux niveaux : le regain progressif de pertinence et d'agressivité de la gauche et les fissures qui commencent à se dessiner au sein de la famille UMP. Sur le sujet, «les mauvais souvenirs» que l'ADN rappelle à une figure historique de la droite comme Charles Pasqua ou les hésitations ostentatoires de l'ancien Premier ministre Jean Pierre Raffarin en disent long sur le profond malaise que traverse le camp présidentiel. Mais cela n'a pas été exprimé par la vigueur, dorénavant légendaire de Dominique de Villepin : «Ce type de législation n'est pas de mise, n'a pas de place dans notre pays. Notre mémoire, notre histoire, nous conduit à condamner tout ce qui ressemble à ce genre d'arsenal, dans la mesure où nous avons connu, malheureusement, les rafles et le rejet de l'autre». Il faut ajouter à cette levée de bouclier la position remarquée du président de la commission de l'Union africaine (UA), Alpha Omar Konaré, pour qui «ces tests ADN sont inconcevables. Ils sont inacceptables au niveau éthique, moral et culturel». Devant cette fronde, le président Nicolas Sarkozy n'a pas encore vacillé. Impérial, droit dans ses bottes et ses convictions, il lance à ses challengers : «J'ai été élu pour bousculer les choses» et de mettre cette mauvaise humeur sur le compte de «petites crispations dues à des différences de générations». Mais Nicolas Sarkozy dont l'instinct politique avait déjà fait des merveilles, sait que le piège se resserre petit à petit et que le moment où il aura à choisir entre passer en force, outre ces remontrances et ces oppositions ou se retirer n'est pas loin. Avec le prix à payer… dans un cas comme dans l'autre.