Le réalisateur Ahmed El Maânouni revient du festival de Cannes où il a été désigné membre de la World Cinema Foundation dirigée par Martin Scorsese. ALM : A l'issue de la présentation de votre film «Transes», vous avez été désigné membre de la toute récente World Cinema foundation. Que pensez-vous de cette initiative ? Ahmed El Maânouni : Pour parler de cette fondation qui a pour mission de restaurer et de préserver les chefs-d'œuvre du cinéma mondial, il faut remonter à la source. Martin Scorsese a une action de longue date sur la préservation du cinéma aux Etats. Il a réussi à convaincre plusieurs personnalités influentes aux Etats-Unis et dans le monde de l'intérêt d'une telle opération. Ce cinéaste est un cinéphile doublé d'un amoureux du cinéma mondial. Partant de là, il a décidé de créer une fondation pour la préservation du cinéma mondial. Mais vu que les belles idées ne suffisent pas si elles ne sont pas accompagnées de moyens financiers, le réalisateur a réussi à lever des fonds et à trouver des sponsors très prestigieux. Pour la mise en œuvre officielle de la fondation, il a choisi le festival de Cannes pour présenter la première œuvre qui inaugure l'action de l'institution. Il s'agit de mon film «Transes». Qu'est-ce qui explique selon vous la décision de Martin Scorsese d'inaugurer l'action de la fondation par la restauration de votre film ? Le choix de cette œuvre ne s'est pas fait au hasard. Le film « Transes » l'a beaucoup marqué. Martin Scorsese raconte qu'il a vu ce film dans une chambre d'hôtel à New York, il y a plus de vingt ans. Lorsqu'il était en train de zapper, il est tombé sur le film sous-titré en anglais et qui était diffusé sur une chaîne américaine. Quelques mois après lorsqu'il était à Paris, il s'est procuré mon numéro de téléphone, mais il n'est pas arrivé à me joindre. Il m'a laissé un message sur la boîte vocale dans lequel il m'a fait part de son émotion après avoir vu mon film et voulait disposer de mon autorisation pour utiliser la musique du film pour la BO de son œuvre « La dernière tentation du Christ ». Finalement il a rencontré la productrice Izza Genini qui l'a autorisé à utiliser la musique. Par la suite, au Festival du film de Marrakech en 2005, il a présenté le film «Transes» qui était projeté en hommage au cinéma marocain et a fait la relation avec la tentation du Christ. Cela montre la fidélité qu'il témoigne à l'égard de mon film. Vous avez été invité officiellement à l'inauguration de la «World Cinema foundation» à Cannes. Comment se manifestera votre action au sein de cette structure ? J'ai été officiellement invité à faire partie de cette belle idée. Je serais amené de ma part au sein de mon air géographique à proposer des films à sauvegarder. En plus des œuvres marocaines comme «Mirage» d'Ahmed Bouânani ou encore «Wechma» de Hamid Bennani, il y a des centaines de films africains qui sont très intéressants et qu'il faudrait préserver. Je serais amené également à trouver des sponsors pour financer ces films car cela nécessite énormément de moyens. Il est important néanmoins de savoir que mon action n'est pas un emploi à plein temps. Il ne suffit pas d'appuyer sur un bouton. Cela nécessite beaucoup de temps. Actuellement je suis pris par la mise en orbite de mon nouveau film «Les cœurs brûlés» Pour le cas de «Transes», comment s'est effectuée sa restauration ? Les négatifs des films subissent des détériorations. Il y a beaucoup d'élèments qui se perdent avec le temps. La restauration du film consiste à lui donner une nouvelle genèse. En ce qui concerne le film Transes, il a été tourné sur près de 16 pistes, ce qui a donné un mauvais résultat au niveau du son. Aujourd'hui, avec la version restaurée du film, on dispose d'un son dolby, ce qui était impossible de réaliser à l'époque, vu le coût exorbitant de cette technique. La restauration de Transes s'est déroulée dans un temps record en Italie à la cinémathèque de Bologne.