Les ouléma se mobilisent contre la propagation des thèses takfiristes. Ils étaient en conclave, samedi, à Casablanca. «L'Islam est une religion de modération, de tolérance et de dialogue. Les thèses dont se nourrissent les discours terroristes n'ont aucun fondement ni dans le Coran ni dans la Sunna. Les justifications avancées par les partisans de l'idéologie takfiriste, lesquelles leur servent de prétexte pour tuer des vies innocentes, découlent d'une interprétation fallacieuse des textes religieux». Tel est le message qu'ont tenu à réitérer les ouléma, lors du symposium de Casablanca sur la norme juridico-religieuse à propos des thèses terroristes. Une première du genre organisée par le Conseil supérieur des ouléma pour contrecarrer la propagation des thèses terroristes. A l'ouverture de ce séminaire, le secrétaire général de cette instance, Mohamed Yessef, s'est voulu précis. «La doctrine takfiriste est un mal qui menace la Oumma. Ceux qui la professent s'écartent gravement des enseignements de l'Islam. L'argumentaire des tenants du discours terroriste n'a aucun fondement religieux». Quels sont les principes sur lesquels repose la doctrine takfiriste ? Le président du Conseil régional des ouléma d'Oujda, Mustapha Benhamza, explique que «les adeptes du takfirisme confèrent à leur mouvement terroriste une légitimation religieuse sur la base de trois postulats. Excommunier la société au prétexte qu'un des fondements de la foi (croire, dire et agir) serait défaillant ou au prétexte que sont commis des péchés capitaux (Al Kaba'îr). Ou encore excommunier ceux qui résident dans un pays régi par des lois non islamiques». Or, selon la Chariâ, souligne M. Benhamza, ces arguments sont fallacieux et en contradiction avec les principes de l'Islam. Car, ajoute-t-il, la question de la foi relève strictement de l'individu et les actes sont la condition d'une perfection de la foi et non de sa validité. «Le fiqh considère que les musulmans ont le devoir de sauvegarder la sécurité et la stabilité de tout pays avec lequel ils ont conclu des pactes de paix», renchérit-il. Pour sa part, le président du Conseil des ouléma de Safi, Abderrazzaq El Ouazkiti, a axé son intervention sur la notion de la “Jahiliya”, terme attribué à notre époque par les extrémistes. «La jahiliya est une époque préislamique. Attribuer ce terme à une quelconque époque de l'Islam, même si elle connaît des défauts et des vices, n'a aucun fondement au regard de la loi divine», rétorque-t-il. Pour cet éminent alem, cette assimilation, qui ouvre la porte de la discorde chez les musulmans, a pour objectif de susciter le doute en matière de religion et de la Chariâ. Le Jihad, l'argument derrière lequel se cachent les terroristes pour justifier leurs crimes, a été également évoqué par les ouléma. Le Jihad, soulignent-ils, a été décrété pour la protection de la religion, de la vie, de l'honneur et de la propriété. Le terrorisme, au contraire, déclare la guerre sans qu'aucun de ces éléments ne soit menacé. Le Jihad consiste à détendre la liberté de l'homme dans ses croyances et à préserver sa dignité. Or, martèlent les conférenciers, le terrorisme a pour objectif la conquête du pouvoir et la domination d'autrui. Un totalitarisme pur et dur. Par ailleurs, "le califat", "la consultation" (Shura), "le salafisme" et "l'excommunication" (At-takfir) ont été également abordés. À travers ce séminaire, les ouléma visent à riposter aux thèses terroristes en se basant sur les préceptes du Coran et de la Sunna pour éclairer les esprits et lever toute ambiguïté. Vu l'importance de l'événement, plus de 1000 ouléma, imams et morchidates ont pris part à cette rencontre dont ceux de la communauté marocaine installée en Europe (Belgique, France, Espagne, Italie, Hollande et Allemagne). «Les ouléma, les imams et les prédicateurs ont un rôle important à jouer dans la lutte contre cette violence aveugle et dans l'amélioration de l'image de l'Islam à l'étranger. Ma participation à ce symposium s'inscrit dans ce sens», souligne Abdallah Boussouf, directeur de l'Institut européen des études islamiques à Bruxelles. Les ouléma ne comptent pas s'arrêter là. Pour prémunir le Maroc contre les velléités d'extrémisme et de terrorisme, ils appellent à la mobilisation générale et à faire des mosquées des tribunes contribuant efficacement à cette lutte.