Cette affaire a le mérite de donner une nouvelle occasion à la jeune démocratie marocaine de tester la fonctionnalité des mécanismes de l'Etat de droit qu'elle a mis en place et de créer un antécédent qui installerait, une fois pour toutes, le système judiciaire marocain comme le premier recours pour toute personne qui s'estime victime d'une quelconque injustice. L'affaire de Rakia Abouali a tous les ingrédients d'un «bon» article de presse. D'un côté, il y a un magistrat accusé de séquestration, de corruption et d'incitation à la débauche…De l'autre, il y a une femme qui se dit victime de harcèlement, d'abus de pouvoir et d'avoir été contrainte à la prostitution. L'affaire en elle-même aurait pu passer inaperçue si tout avait pris son cours normal. Si la femme en question avait saisi la justice pour déposer une plainte contre son présumé «persécuteur», les mécanismes de l'Etat de droit se seraient mis en marche et tout aurait été réduit à un fait-divers ordinaire comme il y en a des milliers partout dans le monde. En Espagne, en Grande-Bretagne et même au pays de l'Oncle Sam où des affaires similaires sont monnaie courante. Il suffit de rappeler le fameux feuilleton de la stagiaire de la Maison-Blanche, Monica Lewenski, et de l'ex-président américain Bill Clinton. Toutefois, Mme Abouali a choisi une autre voie. Elle a commencé par filmer le magistrat dans des postures très délicates notamment dans la salle de bains de l'appartement où, selon elle, ils avaient l'habitude de se rencontrer. Ensuite, elle a envoyé une copie de l'enregistrement à la presse. Mais, entre le moment où elle l'a filmé et l'envoi de ladite copie à certains journaux, il s'est écoulé beaucoup de temps. Qu'est-ce qui l'a empêchée alors de recourir à la justice ou même à la presse dès l'obtention de ce qu'elle croyait être une preuve tangible des abus dont elle aurait été victime ? À cette question et à bien d'autres, elle devra répondre devant le parquet. Mais, déjà, elle est soupçonnée d'avoir tenté de faire chanter le juge en question pendant plusieurs mois en lui exigeant une «pension» mensuelle contre son silence. Et comme cela n'a pas été le cas, elle a voulu en tirer profit autrement. Mais son stratagème n'a pas fonctionné. Et l'affaire a été replacée là où elle aurait dû atterrir en premier lieu : devant la justice. Et c'est à cette dernière que revient le dernier mot. En tout cas, cette affaire a le mérite de donner une nouvelle occasion à la jeune démocratie marocaine de tester la fonctionnalité des mécanismes de l'Etat de droit qu'elle a mise en place et de créer un antécédent qui installerait, une fois pour toutes, le système judiciaire marocain comme le premier recours pour toute personne qui s'estime victime d'une quelconque injustice. Avoir confiance dans la justice et respecter ses verdicts une fois prononcés est l'un des éléments fondamentaux de la citoyenneté dans un Etat de droit.