Signé mercredi matin, l'accord de Bonn dessine les grands traits d'un Afghanistan démocratique et pluri-ethnique alors que les combats continuent sur le terrain. Cet accord historique ratifié en présence du chancelier allemand Gerhard Schroeder et de son ministre des affaires étrangères Joschka Fischer, officialise la naissance du futur exécutif afghan. A partir du 22 décembre, l'ancien président Burhanuddin Rabbani et l'Alliance du Nord, à Kaboul depuis le 13 novembre dernier, devront donc céder la place au nouveau gouvernement en charge de la gestion du pays six mois durant. A la tête de cet exécutif provisoire - au sein duquel apparaît un certain équilibre entre les différentes ethnies – : le chef militaire pachtoune Hamid Karzaï. Sa nomination, comme le reste des 29 membres de la future administration, est l'aboutissement d'un compromis entre les différentes factions présentes à Bonn. Un arrangement qui offre à l'Alliance du Nord les trois ministères-clés de la défense, de l'intérieur et des affaires étrangères. L'ancien roi Mohammed Zaher Shah, dont le retour au pays est prévu pour début 2002, hérite pour sa part d'un rôle honorifique puisque les conférenciers l'ont chargé de convoquer dans 6 mois une « loya jirga » - assemblée traditionnelle de notables afghans - qui devra nommer un autre gouvernement. Prévu pour une période de 18 mois, ce dernier débouchera normalement sur une constitution et des élections démocratiques. Mais pour l'heure, l'ambiance était du côté de l'Allemagne au soulagement et aux congratulations. « Les yeux du monde seront sur vous et vous portez une énorme responsabilité», a ainsi déclaré le représentant spécial de l'ONU pour l'Afghanistan, Lakhdar Ibrahimi à l'adresse des délégués afghans. «Nous sommes très satisfaits du travail effectué par les leaders afghans eux-mêmes, mais aussi par le gouvernement allemand », a également souligné le secrétaire d'Etat américain Colin Powell. Approuvée par l'ensemble de la communauté internationale, excepté les Taliban qui parlent «d'institution fantoche », la conférence de Bonn ne signe toutefois pas l'arrêt du conflit. Bien au contraire, la guerre lancée le 7 octobre par les Etats-Unis contre les Taliban et leur protégé Oussama ben Laden, continue à coups de bombardements du côté de Kandahar, au sud, et de Tora Bora, une région montagneuse de l'est où le chef islamiste semble se réfugier. Mercredi, une attaque conjointe des forces locales au sol et d'un bombardier lourd B-52 américain, a visé des positions tenues par des membres du réseau Al-Qaïda dans cette zone. Alors que les troupes commençaient à encercler Kandahar, une bombe larguée par erreur a par ailleurs tué trois soldats américains et cinq membres des forces anti-Taliban. Le Pentagone a aussi signalé que 19 de ses soldats ainsi que des combattants afghans avaient été blessés. Alors qu'il vient d'être nommé chef du futur gouvernement, Hamid Karzaï, aurait également été légèrement touché.