Ahmed Lahlimi, Haut Commissaire au Plan, explique les raisons du retour de la croissance de l'économie marocaine. ALM : Comment expliquez-vous une croissance de 6% dans une conjoncture marquée par la hausse des prix du pétrole ? Ahmed Lahlimi : Le taux de 6,7% est celui de la croissance enregistrée par la comptabilité nationale au cours du premier trimestre de 2006. Cette croissance a profité de la subvention de la Caisse de compensation qui a amorti l'effet du renchérissement du pétrole sur les prix intérieurs et, par conséquent, sur l'activité économique. Elle n'a, cependant, pas empêché un alourdissement de la facture pétrolière à l'importation accentuant sérieusement le déséquilibre de notre balance commerciale, malgré une amélioration réelle des performances des secteurs marchands non agricoles. A votre avis, la prévision de 7% de croissance à la fin de cette année va-t-elle être dépassée ? Nos prévisions économiques tablent pour 2006 sur un taux de croissance de 7,3%, contre 1,7% en 2005 par référence à l'ancien système de comptabilité national base 1980 auquel se substituera dès la fin de cette année ou au début de l'année prochaine le nouveau système base 1998 qui en modifiera sûrement le niveau et la structure. Cette performance découle des données recueillies par nos services auprès des sources d'informations économiques. La valeur ajoutée agricole devrait connaître, dans ce cadre, une hausse de 30,6%, contre une baisse de l'ordre de 16% en 2005. Peut-on dire que l'économie marocaine est repartie sur un long cycle de croissance ? Pour parler de cycle de croissance, il faut la durée. Nos performances restent encore soumises aux aléas climatiques. Une pluviométrie suffisante et bien répartie sur l'année 2006 devrait porter le taux de croissance agricole de 1,8% en 2005 à 7,3%. Certes, les réformes entreprises par notre pays et les grands chantiers d'infrastructure conjointement avec une politique résolue de développement de certains secteurs porteurs, notamment depuis les sept dernières années, se sont traduits par une amélioration des taux d'investissement et ont contribué ainsi à une relance des activités non agricoles qui semblent effectivement s'inscrire dans un “sentier haussier“ par rapport à la tendance antérieure. Est-ce que la dépendance énergétique du Maroc par rapport à l'extérieur ne rend pas difficile toute prévision ? Cette difficulté est le lot de tous les pays, en particulier ceux qui ne disposent pas de ressources énergétiques suffisantes. Une politique de compétitivité de l'économie nationale s'avère la seule voie durable pour en atténuer les effets sur la croissance. Ce sont de telles politiques qui ont permis, jusqu'à présent, à l'économie internationale d'en résorber les effets. Le Maroc a certes fourni des efforts dans le même sens. Les charges budgétaires que constituent les subventions consenties dans ce cadre seront-elles soutenables dans la durée malgré l'“inélasticité“ des recettes fiscales et les besoins d'investissement requis pour une croissance soutenue et un développement humain durable.