Tenue le lundi 5 juin 2006 à Casablanca, la conférence débat sur «l'Emergence et l'attractivité du territoire Maroc» a attiré beaucoup de monde. L'occasion de bousculer certaines idées reçues. C'est sous le regard attentif des ministres de l'Industrie et du Commerce et de celui de l'Energie, des directeurs centraux de plusieurs établissements, des banquiers et des opérateurs de toute obédience, que le professeur d'économie politique, Charles Albert Michalet a pris la parole, lundi dernier lors de la conférence organisée par la Fédération de l'énergie, pour parler des investissements étrangers et de la manière de les attirer. Pour le professeur de l'Université Paris-Dauphine, de plus en plus, les IDE (investissements directs étrangers) seront moins capitalistiques et plus technologiques. Entre les pays émergents et ceux du pré-émergents, la compétition sera aussi de plus en plus rude pour attirer les firmes étrangères. Deux approches sont aujourd'hui mises en avant par ces pays (le professeur préfère le terme territoire) pour comprendre ce que veulent les investisseurs. Il y a, note l'économiste, «l'approche statique » basée sur les pré-requis et celle dite proactive, faisant de la promotion sa raison d'être. Où en est le Maroc? Quoi qu'il en soit, la bonne gouvernance synonyme de stabilité politique reste au premier rang des pré-requis pour figurer sur «la longue liste des multinationales ». Mais aussi, les attitudes favorables comme la déréglementation et la privatisation. Viennent ensuite, le niveau d'inflation, la balance des paiements et un bon système de communication (téléphone, fax, internet). L'allégement des formalités administratives entre aussi en ligne de compte. La fiscalité n'est pas du reste. Le professeur s'oppose tout de même aux variations intempestives des règles d'impôts, réformes qui brouillent l'investisseur et entravent les projets à long terme. Et de citer ensuite pêle-mêle, la flexibilité du travail, la formation, la disponibilité des terrains industriels avec des droits de propriétés fixés, la disponibilité des ressources énergétiques et la présence de l'Etat de droit…Attention, prévient M. Michalet, les incitations sont secondaires dans les facteurs qui poussent l'investisseur à choisir tel pays contre tel autre. «Ce n'est que la cerise sur le gâteau». Dans l'autre approche, celle dite proactive, les choses ne sont pas aussi simples. Visibilité et crédibilité restant des mots-clés de toute action de promotion, celle-ci doit faire passer l'intérêt des firmes en premier. Les promoteurs doivent au préalable connaître la stratégie des firmes et surtout les facteurs-clés qui les poussent à prendre la décision d'investir. La taille du marché et le niveau de croissance conjugués à la réduction des coûts forcent la décision de la délocalisation ou de l'externalisation. Les coûts salariaux bas sont importants, mais, note encore une fois le professeur français, «à productivité égale». Les coûts des imputs (composants) sont aussi décisifs. «Les firmes étrangères veulent en plus que les entreprises locales fassent une partie du travail. C'est une chance pour le Maroc». Ne reste pour le royaume qu'à ficeler une politique de promotion à la mesure du plan Emergence, lequel sera présenté d'ailleurs par Salaheddine Mezouar au cours de la conférence. Une bonne promotion doit rendre visibles les réformes entreprises, sachant que les investisseurs ont toujours une «information imparfaite». C'est aussi du rôle de la promotion de modifier les préjugés. Attention tout de même, prévient l'invité de la Fédération de l'énergie, à ne pas annoncer des réformes qui n'existent pas. Une idée partagée sûrement par le président de la Fédération de l'énergie, Moulay Abdallah Alaoui, qui a mis l'accent sur le long processus de réformes du secteur de l'énergie: privatisation de la distribution des produits pétroliers en 1994, du raffinage en 1997, de la production électrique à Jorf Lasfar en 1995, des Régies de distribution de Casablanca en 1997, de Tanger –Tétouan en 2001 et de Rabat en 2002. Les lourds investissements programmés dans diverses filières énergétiques pour faire face à la croissance de la demande marocaine d'électricité de l'ordre de 8% par an, donneront sans doute plus d'attractivité au pays.