Pour avoir des déclinologues, il faut un déclin. Et pour avoir un déclin, il faut vivre une phase descendante qui succède à une phase ascendante. La France a beau être enviée dans le monde, quand tu y vis, il y a comme une ambiance de «merde» qui règne. Le pays a beau être celui de la gastronomie, du raffinement, de la haute couture, il donne le sentiment de traverser un interminable tunnel de sinistrose. La France est, selon une radiographie de 30 pays européens présentée à Bruxelles, «4 ème exportateur mondial de service», elle est «au quatrième rang planétaire comme pays d'accueil». Elle est en outre, note le rapport, «particulièrement bien placée sur les biens de moyenne et haute technologie». Pourtant, ces bonnes notes n'empêcheront pas ceux, que Villepin a qualifié de «déclinologues», de continuer à diagnostiquer le pays comme atteint de sclérose en plaque. Chez les déclinologues français, il y a ceux qui retiennent les violences urbaines, le communautarisme et la fragmentation tribale comme des menaces pour le pacte républicain. Et il y a les autres. Ceux qui ne scrutent que le taux de chômage et les déficits abyssaux des comptes publics. Ces deux types de déclinologues se liguent le plus souvent pour confectionner une ambiance funeste. Ils fabriquent un «air du vide» poivré avec la peur et salé avec les jérémiades. Comparaison n'est pas raison. Le Maroc semble, pourtant, souffrir du même syndrome. Il est comme travaillé par le même mécanisme sournois. On ne peut parler à proprement de déclinologues. Pas parce que nous manquons de problèmes de croissance ou développement, bien au contraire. Pas parce que la pauvreté prégnante, le chômage cancérigène et les inégalités patentes ne constituent pas matière à dissertation, loin de là. Mais pour avoir des déclinologues, il faut un déclin. Et pour avoir un déclin, il faut vivre une phase descendante qui succède à une phase ascendante. On peut difficilement trouver quelqu'un de censé qui affirmera que le Maroc d'aujourd'hui est pire que celui d'hier…sauf chez ceux qui pourraient être nos «déclinologues» à nous. Experts du maniement de la déconsidération, ils sont devenus les censeurs pavloviens du pays. La Banque mondiale sermonne nos défaillances et nos rigidités! Ils sont les premiers à célébrer, avec youyous, le mémorandum. Le père Ménard fait escale à Rabat. Ils vont se suspendre, avec gourmandise, à ses lèvres pour glaner la moindre saillie empoisonnée qui sortira de sa bouche. Une obscure association occidentale profère une fadaise, celle-ci devient aussitôt un point d'appui pour mitrailler à tout va. Adeptes de la religion du discrédit, nos déclinologues affectionnent la critique qui provient de l'extérieur. Rien ne trouve grâce à leurs yeux : La moudawana ? Peu importe le volontarisme politique, c'est la défectuosité de sa mise en oeuvre qu'ils pointeront. Les droits de l'Homme au Maroc et l'IER ? Qu'importe la singularité de l'expérience! Ne pas élucider le dossier Ben Barka, voilà qui obère la démarche ! L'INDH ? Que dalle ! L'Amazighité ? Que nenni… A se demander si les déclinologues marocains ne sont pas de vrais statuquologues….