Les tragiques émeutes de Casablanca, survenues en juin 1981, se sont soldées par des dizaines de morts, arrestations abusives et procès en série. Retour sur une période sombre de l'histoire de la métropole. C'était en juin 1981 qu'avaient éclaté les émeutes de Casablanca connues sous le nom «des émeutes du pain». Une des périodes sombres de l'histoire de Casablanca. Ce soulèvement, qui a coûté la vie à des dizaines de personnes, a refait surface après la récente découverte d'un cimetière jouxtant la caserne des sapeurs-pompiers de la métropole. L'origine de cette soudaine flambée de violence était la hausse des prix des principales denrées alimentaires. Cette mesure prise par le gouvernement de l'époque, avait ainsi mis le feu aux poudres. La colère des masses populaires était alors largement nourrie par les contradictions sociales et ce fut la goutte qui a fait déborder le vase. En guise de protestation, la CDT avait appelé à observer une grève générale le 20 juin 1981. Les manifestations se sont multipliées durant deux jours donnant lieu à une série d'émeutes et d'affrontements entre forces de l'ordre et protestataires. Les masses s'attaquèrent à tous les symboles de la bourgeoise et du capitalisme : agences bancaires, villas, palais de la colline d'Anfa, voitures de luxe de la grande bourgeoisie... Face à cette situation qui ne faisait que s'aggraver, Driss Basri, alors ministre de l'Intérieur, employa la méthode forte. Le mot d'ordre était la répression. Mais pas n'importe laquelle. Il s'agissait d'arrestations et inculpations en masse, procès en série, fermeture de locaux et interdiction de journaux. C'était toute une panoplie policière et judiciaire qui fut déployée à l'encontre de la C.D.T et de l'U.S.F.P, accusées d'avoir été les instigateurs du soulèvement populaire. Une longue série de procès s'ouvre dans les grandes villes du pays, même dans celles où aucune violence n'a été signalée. Les poursuites visent indistinctement les manifestants et les militants syndicalistes et politiques. Les verdicts étaient sévères et reflètent la volonté du pouvoir, notamment du ministère de l'Intérieur, de briser l'influence politique de l'opposition socialiste. Une véritable chasse aux sorcières. La préfecture de Casablanca, qui abrite 3,2 millions d'habitants, est découpée en cinq nouvelles préfectures de manière à assurer, sous couvert d'une gestion plus efficace, un contrôle renforcé de la population, en même temps qu'est décidé un plan de promotion des zones rurales et des quartiers populaires des villes. Abdelkamel Reghaye du parti RNI, qui était à l'époque ministre des Finances, devait lui aussi payer les pots cassés. Ces évènements lui avaient coûté son poste d'argentier du Royaume. Récemment, une fosse commune vient d'être découverte à Casablanca où étaient enterrés 77 corps de personnes tuées lors des affrontements de 1981. Une commission d'enquête a entamé ses travaux à Casablanca pour l'identification de ces victimes enterrées dans un cimetière jouxtant la caserne des sapeurs-pompiers de la métropole. Il s'agira de déterminer avec exactitude s'il s'agit de fosses communes comme il a été avancé par plusieurs sources ou de tombes individuelles. Cette Commission d'enquête comprend des membres de l'IER, dont le président Driss Benzekri, ainsi que des représentants des départements de la Justice, de l'Intérieur, des Affaires islamiques et des Habous en plus du chef du parquet de Casablanca qui en préside les travaux.