L'Egypte et l'Allemagne déploient de nouveaux efforts pour tenter de ressusciter un dialogue de paix israélo-palestinien au point mort au moment où Sharon recourt à de nouvelles manœuvres dilatoires. En effet, les Israéliens attendaient jeudi que leur Premier ministre dévoile ses intentions politiques, après une série de déclarations ambiguës sur de possibles "mesures unilatérales" dans les territoires palestiniens. "Le problème pour Sharon c'est qu'il doit tenir compte de pressions contradictoires: l'opinion veut qu'il prenne l'initiative, alors que Washington s'oppose à toute action unilatérale qui préjugerait du statut final des territoires palestiniens", note le politologue Mark Heller. Sharon devrait, selon lui, se prêter à un exercice de haute voltige: "proclamer qu'Israël reste attaché à la Feuille de route (le plan de paix du Quartette) alors qu'il n'y a jamais cru, tout en annonçant des mesures unilatérales." Une chose est certaine: les Israéliens sont de plus en plus inquiets de l'immobilisme du gouvernement Sharon dont la popularité est en baisse continue. C'est dans ces conditions que le ministre égyptien des affaires étrangères s'apprête à effectuer lundi prochain une visite en Israël au cours de laquelle il rencontrera Ariel Sharon. Ce sera la première fois en deux ans. Ce voyage vise la redynamisation du rôle de l'Egypte dans la recherche d'un cessez-le-feu entre Israël et l'Autorité palestinienne. La diplomatie égyptienne, forte des promesses américaines de faire des pressions sur Tel-Aviv, poursuit ses initiatives pour arracher une trêve aux organisations palestiniennes qui luttent contre l'occupation israélienne. Des garanties américaines auraient été obtenues par l'Egypte, qui négocie une trêve avec douze groupes palestiniens, dont le Hamas et le Jihad, au terme de laquelle ils suspendraient leurs attaques afin de pouvoir négocier un cessez-le-feu israélo-palestinien. Du côté d'Israël, 85% des Israéliens attendaient que leur Premier ministre abatte ses cartes. Une forte majorité d'Israéliens (72%) est par ailleurs en faveur du démantèlement de certaines colonies isolées dont la défense pèse lourdement sur eux. Sharon a déjà évoqué, mais en termes vagues, la possibilité de démanteler des colonies juives isolées dans le cadre de "mesures unilatérales", provoquant de vives dissensions dans son propre parti le Likoud. L'aile la plus extrémiste du gouvernement, relayée par le lobby des colons, est aussitôt montée au créneau. Elle accuse Sharon et avec virulence son vice-Premier ministre Ehud Olmert de « capituler » et de renoncer au credo du Grand Israël, aux frontières bibliques, comprenant Israël et les territoires palestiniens. Toute évacuation d'implantation "sous couvert de regroupement stratégique" serait une "fuite" en avant inadmissible, a mis en garde à la radio le chef du Parti ultranationaliste religieux (PNR), le ministre Effi Eytam. L'extrême droite menace de quitter le gouvernement si Sharon évacuait des colonies, mais elle doute qu'il le fasse. A gauche, l'opposition travailliste se montre sceptique tout en se préparant à un retour à un gouvernement d'union nationale si l'extrême droite en sortait. Les Palestiniens dénoncent toute "mesure unilatérale" qu'Israël prendrait ou prend déjà, comme la construction en cours d'un "mur de l'apartheid" en Cisjordanie occupée, dont le tracé est rejeté par Washing-ton et l'ensemble de la communauté internationale. Ils ont en outre de bonnes raisons de craindre qu'un démantèlement de colonies isolées s'inscrive dans un plan général visant à annexer de facto des territoires palestiniens, fixer unilatéralement la frontière d'un futur Etat palestinien et restreindre l'étendue de son territoire. Washing-ton a indiqué qu'elle accueillerait favorablement tout retrait des colonies de peuplement tout en estimant qu'une mesure unilatérale ne devait pas se substituer à un accord de paix négocié. "Nous jugerions certainement positive toute mesure de réduction des activités de colonisation car notre but est que ces activités soient réduites ou stoppées", a déclaré le département d'Etat.